Quel dommage que Leonard Bernstein n'ait jamais affronté en entier la Salome de Richard Strauss et le Mefistofele d'Arrigo Boito, ni sur scène ni au studio. Les extraits enregistrés à Paris et Vienne en 1977 et 1978 donnent envie d'en écouter plus.
Le charisme unique de Bernstein transcende les deux orchestres. Sa musicalité, son intensité vibrante, sa recherche continuelle de couleurs et de sentiments (sans pourtant sombrer dans le maniérisme) font de lui un interprète idéal de ces pièces trop souvent noyées dans une onde de décibels. Sa Salome est des plus sensuelles, son prologue de Mefistofele est grandiose, sans jamais devenir grandiloquent.
Pour le finale de Salome (et quelques lieder de Strauss) Bernstein s'est assuré la participation de Montserrat Caballé. En bonne forme vocale, elle ne se hisse pourtant pas au niveau du chef. L'aigu est sûr, mais un peu forcée, le chant est extrêmement nuancé, mais trop avare de couleurs. Et le timbre manque de cette sensualité si particulière qui fait la différence entre une bonne chanteuse et une grande straussienne et qui est indispensable notamment pour le rôle de Salomé. Nicolai Ghiaurov en revanche est un Mefistofele de première classe, grâce à l'autorité et au mordant de son, même si le timbre sonne un peu sec dans cet enregistrement.