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Daishin Kashimoto et Itamar Golan au Louvre, de l’épure tout en intensité

Un piano racé, un violon aux timbrages stupéfiants (Jupiter, le Stradivarius de 1722) et, jusque dans la pureté des traits de chacun des deux musiciens, comme une complicité dans la tension. C'est dire si l'opus 50 de Beethoven, dense et marqué, était une bonne introduction pour l'opus 134 de .

Ecrite pour le 60ème anniversaire de David Oïstrakh (1908-1974), elle ne fût créée qu'en 1969 par le dédicataire et Sviatoslav Richter. Au Louvre, ce 18 octobre, le duo rend chacune des pages avec tant de limpidité et de force, qu'il permet d'entendre dans les passages forte, un développement toujours renouvelé, au lieu du seul dramatisme qui vaut à la sonate d'être parfois comparée à une symphonie. Le deuxième mouvement s'ouvre d'une brutalité franche, prépare des dévalements pleins de nerfs, si bien qu'un accident de cordes interrompt quelques minutes le concert. Mais, à son retour, n'a rien perdu de sa concentration : la souffrance de son staccato est toujours l'écho d'une violence inouïe, si ce n'est donc une atrocité qui impose la retenue, impossible de toute façon… Dans le dernier mouvement, au lieu d'un apaisement bourré des largeurs oxygénantes promises en surface, le jeu du pianiste, très investi, engage un climat, une vitalité, qui s'excite et apostasie, par la force de son épanouissement, toute la contrariété que l'on peut imaginer.

Après l'entracte, les deux musiciens interprètent les Dix préludes de Chostakovitch, comme des études miniatures, charmantes et chercheuses, suggestives et si brèves, judicieuses pour faire entendre comment, en 1932-33, le compositeur préparait quelques tics futurs, des cellules mélodico-rythmiques reconnaissables et moins importantes que le traitement qu'il peut en donner, comme par montage, opus après opus. La dernière œuvre au programme, la Sonate n°10 que Beethoven a écrit en 1812 (l'année des Symphonies n°7 et 8). Si les musiciens semblent alors moins s'engager, moins s'investir, presque reposer sur leurs acquis, c'est comme pour trouver dans le détachement une sorte d'allant. Le teint est amoureux dans l'Adagio, rustique dans le Scherzo, et organisent les différences de plan comme une mélodie au-delà du thème, au cours des phrases et, pourquoi ne pas le dire comme ça, des paragraphes. Et même quelques moments de grâce dans le dernier mouvement, à la facture charmante, pourtant.

Crédit photographique : © Pohl

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