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Les audacieux du XXe siècle

Anniversaire Vol I

Le retour de et de l' est salué comme il se doit par le public grenoblois : la salle est comble pour entendre ce programme aux allures disparates, parcours entre des œuvres surprenantes en leur temps qui sont passées à la postérité.

Le concert débute par l'une des œuvres phares d' : Intégrales, pièce intense et dynamique, dont les changements brutaux de climats et d'intensité rendent l'audition en enregistrement très intéressante. Pourtant en concert les fortissimi paraissent agressifs, et les passages plus subtils, brouillons. Composée en 1925, cette œuvre nous apparaît finalement comme une recherche audacieuse mais maladroite sur la matière sonore, qui, à la manière de certains tableaux de la même période, force le respect mais ne convainc pas.

Suit une pièce de Boulez lui-même, Dérive 1. La finesse du tissu sonore et de ses évolutions, la richesse des timbres conquiert et fascine instantanément. La mise en regard de ces deux premières œuvres procure une délicieuse sensation de bien-être à l'audition de la pièce de Boulez, dont la subtilité semble d'autant plus évidente après les éclats de Varèse. Composé quatorze ans auparavant, le Concerto de chambre de Ligeti, bien qu'il soit d'une écriture plus « conventionnelle », avec son découpage clair en quatre mouvements de caractères différents, semble inscrit dans la même veine. Les textures se déroulent, se modifient, s'enrichissent dans un ensemble dont la richesse harmonique et rythmique subjugue et séduit.

Boulez a choisi de conclure ce concert par l'une de ses œuvres, sur Incises. Sous la baguette du compositeur, cette œuvre, la plus longue du concert (37 minutes) a su captiver le public au point que l'attention de cette salle comble devienne palpable et que les passages les plus pianos semblent flotter dans l'atmosphère … l'un de ces instants magiques que l'on ne peut vivre qu'en concert.

Pourtant, l'accueil final du public, s'il fut chaleureux, ne fut pas totalement enthousiaste. Comme si chacun avait particulièrement apprécié la qualité du musicien et du chef, mais avait été déstabilisé par le programme. Certains ont préféré les premières œuvres, d'autres la dernière, mais, finalement, peu ont été transportés par l'intégralité du concert. Et, tout compte fait, peut-être est-ce là l'intelligence de cette programmation : la diversité de ces œuvres a permis de les découvrir différemment et de les apprécier individuellement. Si le grand public a encore parfois des réticences à appréhender les œuvres du XXe siècle, c'est aussi à travers ce genre de démarche qu'on fera tomber les barrières.

Crédit photographique : © DR

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