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Paul Claudel et la musique

Ce corpus épistolaire, présenté par Pascal Lécroart, est destiné à la fois à un public de mélomanes éclairés, qui ne pourront qu'être alléchés par le matériel inédit concernant la vie privée et artistique de , et aux spécialistes qui y trouveront toute sorte d'informations littéraires, historiques et dramaturgiques.

Ces échanges entre Claudel et les plus grands artistes de la première moitié du XXe, tels que Hindemith, Honegger, Stravinsky, pour en citer quelques uns, nous permettent de pénétrer au cœur du processus créatif de l'artiste et de son mysticisme, intimement lié à la création artistique. Le rapport entre musique et drame, imprégné d'un profond sens religieux, est déjà clairement esquissé au début de sa carrière de dramaturge. Dans la lettre à Florent Schmitt de 1909, Claudel définit la musique comme une «femme» et le drame, un «mâle», élément essentiellement viril et primordial basé sur la respiration et suivant l'émotion. L'union mystique et spirituelle des deux éléments donnerait vie, selon l'écrivain, à la dramaturgie. Sa vision de la musique, voisine de Dieu et communiquant avec Lui, trouve des analogies dans toute l'œuvre de Beethoven pour lequel l'écrivain manifeste la plus grande admiration. Fervent beethovénien, Claudel maintiendra toujours son intérêt pour le musicien allemand et son système de composition exaltant la surprise, l'innocence et la joie religieuse.

La musique inspirée par ce sentiment de «béatitude éternelle» possède pour lui des richesses qui surpassent le langage parlé et qui permettent de pallier ses insuffisances. S'adressant à Jacques Benoist-Méchin ou à Joseph Samson, il place la vocation de musicien comme supérieure à celle d'écrivain.

Les échanges avec ce dernier offrent un témoignage émouvant entre Claudel et son critique, qui se rejoignent tous deux dans leur nature d'artistes profondément dévoués à la célébration de l'œuvre divine.

Samson fut une personnalité importante du monde musical de son époque (et l'on commémore, en cette année 2007, le cinquantenaire de sa disparition, après qu'on eut, en 2005, célébré celui de Claudel). C'est cependant en tant que musicologue, et non comme musicien, que Joseph Samson entra en contact avec Claudel. Son étude , poète-musicien, imprégnée de multiples références théologiques outre que musicales et littéraires, révèle une connaissance impressionnante de l'œuvre claudélienne. Nombre d'analyses et de remarques frappent par leur précision et leur justesse, surtout par rapport à ce que Samson appelle l'influence du style biblique sur l'écriture de Claudel. Le regard du musicologue tendant à ramener l'œuvre poétique et théâtrale à une conception théologique et idéologique du monde. Cette critique qui bénéficia de l'agrément de Claudel, offre une vision synthétique et précieuse que les travaux de Dominique Millet-Gérard poursuivent aujourd'hui. La correspondance entre les deux artistes donne l'occasion d'observer l'évolution de leur relation d'abord professionnelle et ensuite amicale, nourrie d'admiration réciproque. Les interrogations spirituelles de Samson permettent à Claudel de résumer sa conception théologique à travers le dogme de la Communion des

Saints et révèlent un profond sens de caritas sous-jacente à toute son œuvre. L'entière correspondance enrichie par un grand nombre de photos, dessins et manuscrits, montre d'une façon claire et détaillée la magnifique vocation musicale et théâtrale de qui demeure l'un des plus grands artistes du XXe siècle.

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