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Beethoven par Mahler et Mahler par Schoenberg

Deux pièces connues du grand répertoire, certes, mais… pas seulement ! Le Théâtre des Champs-Elysées a choisi d'offrir au Parisiens deux œuvres bien connues mais dans des versions qui le sont beaucoup moins. Le Quatuor à cordes n°11, op. 95 de Beethoven est joué ce soir dans sa version orchestrale due à . La version élargie à l'orchestre à cordes peut dérouter. La sonorité d'ensemble y gagne en velouté ce qu'elle perd en intensité dramatique et en intimisme. Le premier mouvement est magnifié par l'ampleur que prennent alors ses attaques. Il en est de même du troisième, dont le Vivace ma serioso assez sec du quatuor original devient un grand mouvement symphonique magistral. Le second mouvement est, par contre, moins reconnaissable, atrophié depuis sa dimension de chambre « gonflée » pour orchestre. L' dirigé par y fait preuve d'une cohésion superbe, en dépit de quelques flottements.

Le Chant de la Terre n'a pas non plus été donné dans sa version originale mais dans une réduction. Commencée par Arnold Schœnberg, la transcription fut achevée par le musicologue Rainer Riehm à la fin des années 1970 et au début des années 1980 et fut créée en 1982. La réduction réalisée par Schœnberg ôte à l'œuvre de Mahler une part de sa majesté et de sa somptuosité. Ce faisant, son intention était de mieux donner à entendre chaque mouvement. Les tons paraissent donc exacerbés, car moins fondus dans la masse orchestrale. Ce chant de la terre et de la nature, et surtout du poète au sein des éléments, se fait alors plus âpre, rugueux et particulièrement captivant. fait une entrée imposante avec le Chant à boire de la douleur de la terre, ce qui l'empêche de monter ensuite progressivement en puissance comme il le faudrait lors de l'évocation inquiétante du singe hurlant au clair de lune sur une tombe. Son De la jeunesse est en revanche très réussi, animé d'une voix souple et franche. Après les Nuits d'Eté de Berlioz et la Passion selon Saint-Jean de Bach, retrouvait et son ensemble. La contralto offre un son voluptueux, et démontre de façon magistrale son art d'habiter chaque mot. De la beauté est extatique et L'Adieu vécu et interprété avec pudeur et justesse. Si l'on peut s'interroger sur le choix de cette transcription à une époque où l'on est en mesure de jouer l'original plus brillant, l' a dignement relevé le défi. Certes, on a déjà entendu interprètes plus inventifs mais le premier violon solide et l'excellente clarinette dominent un ensemble attentif à donner vie à une pièce hybride et difficile. Le public enthousiaste a souligné par ses chaleureux applaudissements cette double performance.

Crédit photographique : © Yves Renaud

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