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Un quatuor à suivre

Four Suites, le nouvel album du Barrios Guitar Quartet (BGQ), est tellement passionnant qu'il nous impose de procéder par ordre, en commençant par les extraits de The Fairy Queen de Purcell, arrangés par Stefan Hladek. Le BGQ y trouve une élégance chiche, des attaques franches, assorties de jeux de plans très imagés. La transcription peut se réfléchir en un nombre de facettes incalculables : puisque l'influence est diffraction, c'est Purcell comme ancêtre de Britten, Tippett ou Nyman qui est invoqué. Les ornementations tellement guitaristiques dans la Chaconne, par idiosyncrasie, rendent à la partition un panache qu'on ne pouvait soupçonner si charnel. C'est aussi Stefan Hladek qui a arrangé la suite de Pulcinella de Stravinsky pour quatre guitares. Il en ressort cinq plages qui, au-delà d'un aspect parfois friandise, est prenant et, justement, comme on aime être pris. Suffit-il d'un dépouillement sans orgueil pour que Stravinsky prenne la suite de Purcell avec, toujours, une teinte ibérique qui arrive à planer au-delà de son ludisme. On pourrait presque reprocher au BGQ de faire dire à Stravinsky ce qu'il n'a pas composé, mais puisqu'on a l'air de pouvoir faire une partition hispanique avec tout, cela ne regarde plus vraiment le corpus de Stravinsky.

Jubilatoires au possible, formidablement homogènes à la suite de Purcell et Stravinsky, les extraits de l'Opéra de quat'sous de sont à la hauteur d'une excitation dûment ménagée d'un bout à l'autre de l'album. L'arrangement de Nangialai Nashir offre aux quatre guitaristes l'occasion de varier les phrasés avec une ardeur communicative. Pour la Complainte de Mackie, les renforts de percussion maintiennent la version à un très haut niveau de dignité : un côté suranné opère comme une saillie jusqu'à l'invraisemblable, avec quelques sifflotements cintrés en contrepartie. Enfin, les Estampas de Federico Moreno Torroba donnent à l'album du BGQ une conclusion douce, fraîche, pour éviter de laisser l'auditeur sur sa faim, même si la seule chose que l'on puisse regretter au bout de l'écoute de ces quatre œuvres, c'est de ne pas en avoir eu assez. Quoique ces 45 minutes soient si denses qu'il y a encore beaucoup à en explorer au cours d'auditions successives.

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