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Toute la lettre…mais l’esprit ?

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Ce mercredi soir, salle Pleyel, c'était le chef qui se trouvait à la tête de l' (on relèvera, au passage, que nos musiciens le verront plus fréquemment puisqu'il vient d'être nommé directeur musical de l'orchestre et qu'il officiera à ce poste à partir de la saison 2010/11).

Écrit à la fin de la première grande période créatrice de Sibelius, le Concerto pour violon provoquait une curiosité bien naturelle relative à l'approche qu'en proposait , confrontée à l'insolite univers du grand compositeur finlandais. Dès les premières notes, son infaillibilité technique calme toute éventuelle appréhension quant à sa capacité à restituer tous les traits d'une partition singulièrement ardue. Mais peut-être aurait-on souhaité qu'elle enrichît cette justesse exemplaire et cette impeccable maîtrise d'une plus grande liberté inventive, voire d'une certaine fantaisie virtuose. Non que son jeu ait été le moins du monde ennuyeux, mais il ne laisse pas de dégager, dans nombre de passages (notamment et paradoxalement, les plus périlleux), un certain sentiment de conformisme peu propice à stimuler l'attention de l'auditoire. Certes, le XXe siècle semble avoir donné la priorité à la lettre sur l'esprit, mais son plus visionnaire compositeur, Edgar Varèse, à peine le cadet de Sibelius, n'a-t-il pas pris le soin de nous rappeler que « le triomphe de la sensibilité n'est pas une tragédie ? ». Combien de grands interprètes actuels pourraient en méditer la leçon !

Témoignage inoubliable du siège tragique de Leningrad, la Symphonie no 7 en ut majeur de Chostakovitch, a toujours rencontré la faveur du public, notamment américain, au grand dam de certaine élite musicale française, encore moins consternée de voir et d'entendre les États-Unis fêter un compositeur soviétique que stupéfaite de l'indifférence de ce même public à ses propres chefs-d'œuvre ! À des années-lumière de ces querelles dérisoires, que reste-t-il de la grande partition du maître russe ? Des thèmes d'une mélancolique beauté, en vagues sonores délicatement dessinées, une ponctuation dramatique de la percussion, des mélismes dont la simplicité peut évoquer certaines tournures du meilleur Verdi, la mise à nu des tragiques dérives de l'homme guerrier, les mornes échos et les tristes rumeurs d'une interminable agonie… D'où, peut-être, cette pénible pesanteur de la phalange instrumentale confiée au chef estonien, ce sentiment de malaise qui a pesé sur tout le lent et monotone déroulement du chef-d'œuvre trahi. N'est pas Evgueni Mravinski ou Leonard Bernstein qui veut !

Crédit photographique : © Kasskara

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