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Anna Netrebko et Marcelo Álvarez, deux vedettes au stade

Le triomphe était déjà programmé. et Rolando Villazón – le couple lyrique le plus chéri des Allemands – avaient annoncé un petit tour du pays, de Stuttgart à Berlin en passant par Cologne et Halle.

Hélas ! Villazón a dû annuler sa participation pour cause de problèmes vocaux. Il ne se produira plus avant la fin de l'année, dit-on. Pour cette tournée, la belle Anna est donc entourée de trois ténors : à Cologne, José Cura à Halle ainsi que Ramón Vargas à Berlin et Stuttgart. Dommage que nous ne puissions suivre tous les concerts pour savoir comment « la Netrebko » s'adapte à ces trois partenaires, tous illustres, mais aussi très différents l'un de l'autre.

Anna et Marcelo donc. L'événement a lieu dans un stade, à la Kölnarena. La presse est placée loin, très loin de la scène, à l'autre bout même de la salle. Nous espérons donc que la sonorisation sera bonne. Evidemment, ce n'est pas le cas. L'ouverture du Barbier de Séville qui ouvre le programme, nous rappelle nos vieux 78 tours. Les graves sont surexposés, les aigus plafonnent et les cordes n'ont aucune brillance. De plus, le chef traîne. Le public applaudit tout de même. Tout à coup, un cri fuse : « Anna ! ». L'ainsi dénommée apparaît en courant, jette les bras en l'air, fait signe au public. Sommes-nous au bon endroit ?

Mais dès qu'elle ouvre la bouche, nos doutes sont dissipés. Contrairement au programme imprimé, elle chante la valse de Musette (La Bohème) et, d'une seconde à l'autre, elle est dans la musique. Tout est là : l'extraordinaire beauté du timbre, le raffinement, la sensualité. , lui, commence par l'air de la fleur, extrait de Carmen. Le chant est nuancé, mais la voix sonne un peu raide et le si bémol aigu est curieusement forcé. Le trac ? Une méforme passagère ? Lorsque l'orchestre entonne le prélude de la même Carmen nous décidons d'oublier au plus vite ces intermèdes orchestraux, le niveau de la sonorisation interdisant toute critique professionnelle. Retour alors d'Álvarez avec « Ah ! Si ben mio » du Trouvère – et… nouvelle déception. L'engagement est là, mais le phrasé manque cruellement d'élégance. C'est un Trouvère bien vériste que nous entendons. Toujours aucune critique en revanche pour Netrebko. Elle enchaîne avec un « Chi il bel sogno di Doretta » (La Rondine) d'anthologie. Elle est enfin rejointe par le ténor pour un premier duo, celui de St. Sulpice, extrait de Manon. Et tout à coup, la magie opère. Devant nos yeux, les deux stars se transforment en Des Grieux et Manon, la voix d'Álvarez se libère, le chef quitte sa réserve. Pour une petite dizaine de minutes nous oublions où nous sommes… Ovations.

Sommes-nous plus indulgents maintenant ? Après l'entracte, la sonorisation de l'orchestre nous semble moins catastrophique. Nous sommes à l'ère des 33 tours maintenant. Álvarez nous fait pleurer par un « E lucevan le stelle » (Tosca) merveilleux avant de nous offrir le plus poétique des « Nessun dorma », couronné, comme il faut, d'un aigu royal. Netrebko nous surprend avec un air de La Wally très nuancé et très intense. Elle s'affronte également à Norma. Si le légato dans « Casta diva » est admirable et si la cabalette se termine par un contre-ut royal, l'interprétation est cependant plutôt sommaire. Nous entendons une prière ardente, mais nous ne devinons guère la lutte intérieure de la prêtresse pécheresse. Le programme officiel se clôt avec un autre duo : « O soave fanciulla », tiré de La Bohème. Et encore une fois, dès que ces deux voix s'enlacent, elles nous transportent au pays des merveilles.

Mais le concert n'est pas encore fini : quatre bis nous attendent. fait délirer la salle avec No puede ser, et nous montre encore une fois les deux faces de sa personnalité. Elle se met en scène dans Meine Lippen, die küssen so heiß » (Giuditta) – danse et jet de fleurs inclus – avant d'aborder, en toute simplicité, « O mio babbino caro » (Gianni Schicchi). La soirée se termine par l'inévitable « Brindisi » de la Traviata, ponctué par les applaudissements rythmés de la salle. Le public est ravi ; mais franchement, nous aurions préféré un autre duo d'amour. Bon gré, mal gré, il faut savoir accepter les choses ; ou éviter les stades….

Crédit photographique : © DR

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