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CRWDSPCR de Merce Cunningham : la fraîcheur d’un octogénaire

Depuis la mort de Maurice Béjart, est le dernier monstre sacré de la danse contemporaine, une véritable légende vivante. Cela n'empêche pas ce fringant octogénaire, né en 1919, de continuer à chorégraphier, avec ou sans l'aide de son ordinateur, des pièces d'une grande fraîcheur.

La dernière en date, eyeSpace, créée à New York en 2006, faisait l'objet d'une première française lors de la rituelle visite du maître à Paris dans le cadre du Festival d'Automne.

Accompagnée d'une musique pour iPods signée Mikel Rouse, que chaque spectateur pouvait télécharger sur iTunes avant de venir au théâtre, cette pièce vive et enlevée, presque primesautière est le fruit d'une inspiration toujours fertile. De petits groupes de danseurs et de danseuses en académiques bleus se succèdent avec fluidité au gré des séquences musicales, formant des trios ou des quatuors harmonieux. Dans la salle, les spectateurs écoutent individuellement, dans l'ordre qui leur sied, les séquences musicales de Mikel Rouse sur leur iPods. Lorsque le chorégraphe vient saluer d'un air malicieux et gourmand, mais en fauteuil roulant, à la fin de la pièce, la plupart des spectateurs ont encore les écouteurs sur les oreilles !

Ce programme parisien était également l'occasion de voir ou de revoir CRWDSPCR, première pièce conçue aléatoirement à l'aide du logiciel Life Forms en 1993, un logiciel suggérant des possibilités de mouvements totalement inédits à transposer ensuite dans le studio. Cette pièce étrange est totalement abstraite, sans aucune aspérité. L'esprit glisse sur ces corps de danseurs disparates, marqués par une esthétique moderniste, passant d'un duo à un quintette et permettant à toute la compagnie de s'illustrer dans des académiques de patchwork multicolores. Mais la plus grande émotion venait des couleurs chaudes et vibrantes de Crises, une pièce historique de 1960, d'une grande virtuosité et nécessitant de la part de ses interprètes une exceptionnelle maîtrise technique. Plus instinctive, plus sensuelle que dans les pièces les plus contemporaines, la danse y dessine les contours d'un jeu amoureux et passionné sur un rythme jazzy. Un programme en trois volets permettant de parcourir quarante six années de danse américaine.

Crédit photographique : Isabelle Meister

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