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Fête le temps de l’Avent à Pleyel avec Nikolaus Harnoncourt

Le public était là, fidèle et nombreux, ce Mardi 18 Décembre à Pleyel, pour le second rendez-vous de l'année (voir notre chronique du 30/01/2007) avec à la tête du et de l'Arnold Schœnberg Chor.

L'éminent chef autrichien avait choisi de célébrer le temps de l'Avent avec trois cantates sacrées écrites par le Cantor à Leipzig entre 1724 et 1731 ; des œuvres qui répondent toutes, comme le rappelle très justement dans sa notice de programme, à une fonction liturgique et exigeraient, dans l'idéal, d'être entendues sous les voûtes résonantes d'une église. L'acoustique relativement sèche de Pleyel nécessitait donc ce soir une certaine proximité d'écoute si l'on voulait pleinement jouir des couleurs de l'ensemble instrumental et de l'extraordinaire travail de détail auquel se livre cet ardent défenseur du discours musical baroque.

Modifiant l'ordre inscrit dans le programme, il débutait par la cantate pour le 24ème dimanche après la Trinité « Ach wie flüchtig, ach wie nichtig » (Ah ! combien fugitive, ah ! combien vaine/est la vie de l'homme) BWV 26, courte partition alternant air et récitatif et encadrée, comme les deux autres, par un chœur d'entrée et un choral conclusif. Si le redoutable air de ténor évoquant par ses figurations virtuoses « l'eau courante et bondissante » reste un défi même pour l'excellente voix de , l'air de basse – confié à -concertant avec le hautbois et la contrebasse sur un rythme endiablé de bourrée confère à cette page une étonnante couleur dramatique. Les parties de chœur, assez réduites dans cette partition, sont des instants de bonheur absolu que l'on doit à l'éloquente précision de l'inégalable Schœnberg Chor.

La Cantate de l'Avent « Schwingt freudig euch empor » (élancez-vous joyeusement jusqu'aux sublimes étoiles) BWV 36 est une adaptation de Bach lui-même d'une cantate profane antérieure. Plus développée que la précédente, elle emprunte à la vieille cantate de choral allemande héritée de Schütz et de Buxtehude cet usage de faire chanter la ligne de choral par les solistes évoluant au-dessus du commentaire instrumental. L'écriture est du plus bel effet lorsque les deux voix féminines – Elisabeth von Magnus et également irréprochables – énoncent tour à tour les différentes périodes du cantique. La voix du ténor , élégante et pure, manque cependant de rayonnement pour rivaliser avec l'orchestre et les deux hautbois soli.

interprétait en seconde partie l'une des plus célèbres cantates sacrées de Bach fondée sur les trois strophes d'un vieux cantique de Philipp Nicolai : « Réveillez-vous, appelle la voix des veilleurs très haut dans leurs créneaux ».

Avec une rigueur qui semble résolument tourner le dos à tout effet superflu – on aurait souhaité peut-être plus d'élan pour cette page lumineuse – Harnoncourt conduit le contrepoint du chœur d'entrée avec une étonnante maîtrise jusqu'à la réunion des voix sur un » Alleluia », fervent mais un rien confidentiel. Entre les deux duetti du soprano et de la basse dialoguant avec les instruments « obligés » – le violon piccolo et le hautbois de chasse – en un parfait équilibre, Harnoncourt soigne tout particulièrement le récitatif accompagné de la voix de basse, faisant valoir chaque mot du texte souligné par les harmonies suggestives de l'orchestre. Célèbre pour la transcription qu'en fit Bach sous le titre de « choral du veilleur », la mélodie toute simple chantée par le ténor planant au-dessus des violons et altos à l'unisson qui font « tressaillir les cœurs d'allégresse », reste, au centre de la cantate, un des grands moments d'émotion de la soirée.

Crédit photographique : © DR

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