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Silvestre Revueltas : Se suplica no tirarle al pianista*

Que venait donc faire ce concerto de Tchaïkovski au milieu d'un programme mexicain ? A-t-on besoin d'un orchestre en tournée pour l'écouter ? A moins que le soliste soit exceptionnel. Malheureusement est dépassé par la partition, et livre une lecture qui manque singulièrement de souplesse. Tout est nerveux, saccadé, martelé, précipité. Seul le mouvement lent central apportait quelques instants de grâce. Derrière le pianiste, l'orchestre n'en menait pas large non plus, avec ses décalages constants et un manque total de respiration.

Pourtant dans Chavez et Revueltas, l' dévoile toutes ses possibilités. Le pupitre de cordes est un peu terne mais n'en reste pas moins sonore, et surtout reste toujours cohérent et en place, domaine dans lesquels les orchestres parisiens ne sont pas les meilleurs. Les cuivres sont très homogènes, seuls les bois se situent réellement un niveau en dessous.

Les deux œuvres proposées en ouverture et fermeture de ce concert sont deux piliers du répertoire mexicain, bien trop méconnu sous nos latitudes européennes alors qu'en Amérique du nord ou Esa Pekka Salonen (pour ne citer que les plus célèbres) ont régulièrement défendu cette musique à la tête de leurs orchestres respectifs. La Sinfonia India est une forme « latino » de la musique d' (par ailleurs contemporain de Chavez), œuvre courte et brillante, dont le but premier est la mise en valeur de l'orchestre. En prélude, le chef d'orchestre, a présenté dans un excellent français les différentes percussions spécifiques utilisées.

En fin de programme l'impressionnante Noche de los Mayas, musique de film arrangée post-mortem en suite symphonique faisait découvrir au public parisien le compositeur . Stravinsky et Respighi se bousculent dans cette vaste demi-heure de rythmes enfiévrés et de vastes plages sonores. Bien que n'utilisant aucun thème folklorique, l'œuvre sonne irrémédiablement mexicain par l'emploi d'échelles modales, de rythmes irréguliers, et surtout d'un instrumentarium particulier, fait d'un pupitre de percussions particulièrement important (dont de nombreux instruments locaux) et de l'emploi (par les trombonistes) de conques. D'énormes coquillages évidemment introuvables dans l'Atlantique nord ou en Méditerranée, évidés, percés à leur extrémité, créant ainsi une embouchure.

Par rapport aux versions existant au disque, et son orchestre en rajoutent dans le dernier mouvement par une impressionnante improvisation de percussions, qui a entraîné un accueil délirant du public. Celui-ci s'est vu gratifié de deux larges bis, véritables « tubes » à Mexico : Huapango de Jose Pablo Moncayo et Sones de maricachi de Blas Galindo.

* Le titre de cet article mérite quelques explications : a beaucoup composé et joué pour le cinéma, et a aussi figuré dans quelques films. Il apparaît brièvement dans ¡Vámonos con Pancho Villa! (1935), comme pianiste de bar, avec le célèbre écriteau « nous vous prions de ne pas tirer sur le pianiste ».

Crédit photographique : © Peter Schaaf ; Strombus gracilior © Lowtide shells

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