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Sans lui, le clavecin ne serait rien !

A l'occasion du 250e anniversaire de la mort de , la claveciniste nous convie à un voyage musical visant à nous faire découvrir l'univers parfois méconnu et ô combien passionnant du clavecin. Les quelque 555 sonates laissées par le compositeur n'appartiennent ni au style classique, ni au baroque, car celui-ci ayant beaucoup voyagé, peut être considéré à la fois comme italien, portugais et espagnol.

Pour notre plaisir, plusieurs sonates sont interprétées sur différents claviers de toutes époques. Concernant l'une d'entre elles en particulier, probablement la plus célèbre, portant le numéro d'opus K 141, on a l'impression que le clavecin « imite » la guitare. Pour produire cet effet, Scarlatti utilise des notes répétées et des accords colorés d'une manière assez linéaire, cette œuvre étant considérée comme un véritable morceau de bravoure. Aline d'Ambrécourt, sans aucune retenue bien au contraire, avec beaucoup de détermination, redonne vie à cette brillante partition. Bien que ce film ne soit pas un concert filmé, les autres sonates qu'elle a également choisi d'interpréter avec exigence permettent de rendre compte que sa largesse de jeu, sa technique impeccable, et sa virtuosité, qui s'accordent parfaitement avec une fine intelligence musicale, s'inscrivent dans un style à la fois souple et ample, sachant toutefois être énergique lorsqu'il le faut. La sonate K 446, quant à elle, est jouée tout en finesse et délicatesse, l'artiste étant en permanence à la recherche du léger raffinement qui pourrait encore agrémenter le plaisir de l'auditeur. Bien entendu, les compositions de Scarlatti sont suffisamment rafraîchissantes pour que le plaisir soit toujours présent, dès les premières mesures.

Cependant, en ce qui concerne Scarlatti, comme l'indique le titre du film, on regrettera que le contenu ne soit pas vraiment approfondi dans ce domaine, cela risquant de décevoir les musiciens qui seraient uniquement désireux d'approfondir leurs connaissances du génial compositeur (né la même année que Bach ou Haendel, en 1685). Bien que le scénario, qui prend celui-ci comme point de départ, donne la parole à plusieurs intervenants de qualité (docteur en musicologie, facteurs et restaurateurs de clavecins, collectionneur, antiquaire expert) qui enrichissent notre connaissance de l'instrument, on aimerait en savoir davantage sur le compositeur qui a tant donné pour le clavecin. Le véritable propos du documentaire étant plutôt « la découverte du clavecin à travers Scarlatti », mais il est assez difficile d'évoquer le premier sans parler de l'autre.

Signalons, pour terminer, que la claveciniste, qui souhaite vraiment nous transmettre sa passion de l'instrument a réalisé elle-même ce documentaire musical, initiative courageuse méritant d'être remarquée. La caméra, qui s'attarde quelquefois sur ces anciens clavecins (dont les scènes dont on les a ornés en font des véritables chefs-d'œuvre), indique que celui-ci a toujours symbolisé une certaine élégance, ce qui fait de ce documentaire un portrait agréable pour les yeux et les oreilles. Quant à l'auteur des 555 sonates, il a tant apporté au clavecin que son nom reste définitivement attaché à l'instrument. En paraphrasant Cioran, on pourrait dire « S'il y a quelqu'un à qui le clavecin doit tout, c'est Scarlatti. Sans lui, le clavecin ne serait rien »

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