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Un Orchestre de la Radio Nationale Danoise de fort bon niveau

Au milieu d'une saison symphonique particulièrement riche qui a vu, ou verra, se succéder dans nos salles parisiennes les plus fameux orchestres de la planètes en provenance de Berlin, Vienne, Amsterdam, Munich, Dresde, Leipzig, Londres, Chicago, Los Angeles etc. la venue, lors de sa tournée européenne de l'Orchestre de la Radio Danoise pouvait constituer une curiosité, tant sa réputation est loin d'égaler celle de ces monstres sacrés. Succédant au Théâtre des Champs-Élysées à la Philharmonie de Vienne et à la Radio Bavaroise, la tâche n'était pas aisée, mais le défi fût relevé avec les honneurs, en particulier grâce à un excellent et très homogène quatuor, tout en restant néanmoins à distance respectable des munichois dirigés par Maris Jansons, il est vrai un des sommets de la saison, mais orchestre de radio également.

Danemark oblige, c'est Nielsen qui ouvrit le concert, avec le poème symphonique Pan et Syrinx composé en 1918 deux ans après la Symphonie n°4 « L'Inextinguible ». Cette pièce relativement courte (moins de 10') est assez dynamique, animée et demande une belle science de la transition pour enchaîner les différents épisodes. On y a senti un orchestre légèrement sur la réserve, comme encore un peu trop appliqué, mais ses solistes, en particulier violoncelle solo et cor anglais s'y montrèrent excellents.

Le Concerto pour violoncelle d'Elgar est une très belle œuvre, et pour certains, le chef d'œuvre de son auteur. Pour lui rendre pleinement justice, il faut savoir l'animer, lui donner du poids et de l'intensité sans tomber dans la lourdeur pompeuse qui n'est jamais trop loin si on n'y prend garde. Et il faut un violoncelle à l'élégante noblesse capable de transmettre l'émotion le plus simplement possible. On ne sait si c'était par peur de mal faire, mais les interprètes, à l'unisson, ont donné l'impression de ne s'être jamais lâchés, ce qui s'est traduit dans la pratique par une dynamique pas assez étendue, un manque d'animation et d'impulsion dans les phrasés orchestraux, un violoncelle manquant d'ampleur. Ceci a donné une interprétation correcte, honorable, mais où jamais on n'a senti un souffle de génie. Dommage car la base est saine avec des équilibres sonores réussis, une assez belle couleur orchestrale et une précision d'ensemble au rendez-vous.

Avec sa Symphonie n°4 en mi mineur, Brahms pose de tout autres problèmes, les deux mouvements extrêmes étant parmi les plus originaux du corpus brahmsien. A la question « comment donc entamer l'allegro non troppo » a répondu « sans chichi » et il a eu bien raison. Ce difficile premier mouvement a montré que le chef avait sans doute donné la primauté expressive aux cordes, ce qui est loin d'être idiot et même assez classique, mais cet excès d'attention lui a fait parfois «oublier» de s'occuper des bois et cuivres qui ont ainsi manqué de fermeté. Dans l'Andante moderato nous avons de nouveau pu apprécier la belle qualité du quatuor, et dans l'Allegro giocoso pris sur un tempo rapide, la précision et l'enthousiasme de l'ensemble de l'orchestre était manifeste. Enfin le final avec sa fameuse passacaille était plutôt bien conduit. Mais comme pendant tout le concert « officiel », on aurait aimé que chef et orchestre sortent un peu de leur réserve appliquée et fasse preuve d'un peu plus d'imagination, d'ampleur, de vigueur et de tranchant pour nous combler. Ce qu'ils ont parfaitement réussi avec un naturel confondant dans les trois bis qu'ils ont enchaînés dès le premier rappel, comme s'ils étaient enfin libérés, retrouvant Nielsen et bouclant ainsi la boucle, ce que le public a immédiatement saisi, applaudissant plus franchement ces brillants bis.

Crédit photographique : © Agnette Schilchtkrull

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