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Attention au sopraniste Radu Marian !

Ravissante partition que cette sérénade italienne sous-titrée « fête pastorale » et composée à Vienne dans les années 1710 afin d'honorer l'anniversaire d'Elisabeth Christine de Brunswick-Wolfenbüttel, vice-reine d'Espagne et épouse du l'empereur Charles VI. Si, de toute évidence, les conventions de ce genre de livret allégorique échappent à l'auditeur du XXIe siècle, peu versé dans l'art et la rhétorique du compliment, ce dernier ne pourra que goûter la virtuosité de ces lignes mélodiques, les audaces harmoniques de certains accords, la subtilité du contrepoint dans l'écriture des cordes ou encore l'originalité de l'instrumentation : on appréciera tout particulièrement l'accompagnement au théorbe de l'air dApollon « Con cetra piu sonora », et de façon générale, chaque morceau s'avère une grande réussite musicale. C'est donc avec le plus grand intérêt qu'on se penchera sur cette superbe partition, autrefois révélée au grand public par un enregistrement discographique dû à Claudio Scimone et à ses Solisti Veneti.

La formation réunie par est certainement plus « authentique » que sa concurrente, notamment dans le choix des tempi, des effectifs instrumentaux et des sonorités orchestrales. Hélas, la réussite d'ensemble est gâchée par une équipe vocale assez terne, surtout en comparaison avec celle réunie en 1983 au sein de laquelle brillaient , Margarita Zimmermann et Sandra Browne. Ici, Gernot Heinrich affiche un timbre franchement désagréable, même si la technique est dans l'ensemble satisfaisante. Si le mezzo d'Adrineh Simonian manque de brillant et de conviction, le soprano de Krisztina Jónás paraît plus adapté à ce type de répertoire. Le meilleur chanteur est sans doute le contre-ténor suisse , remarqué récemment dans le Sant'Alessio de Landi. Gardons pour la fin le sopraniste , qui sera jugé épatant ou détestable selon les sensibilités des uns et des autres. Certains pourront peut-être se laisser impressionner par les sonorités produites par un chanteur qualifié par d'aucuns de « castrat naturel », et dont la tessiture et le timbre sont bel et bien, incontestablement, ceux d'un véritable soprano. D'autres frémiront devant ce filet de voix strident et aigrelet, qui sans doute n'aurait pas attiré l'attention si son propriétaire n'avait été un chanteur masculin. Sans doute ce genre de curiosité est-il tout à fait compatible avec la nature de l'ouvrage interprété, éminemment « baroque » dans tous ses excès et dans ses débordements.

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