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Au revoir et merci maestro

Ce dernier concert symphonique saisonnier de l'orchestre de La Monnaie au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles voyait également l'ultime prestation symphonique de Kazushi Ono en tant que directeur musical de l'orchestre du théâtre lyrique belge. Au terme de 6 ans de mandat, le chef nippon aura conduit 23 productions d'opéras et de nombreux concerts symphoniques, portant les couleurs du théâtre de La Monnaie jusqu'au Japon à l'occasion d'une importante tournée au pays du soleil levant. Incontestablement, le chef est un musicien de premier plan, doté d'un talent exceptionnel de directeur musical. Sous son règne, l'orchestre aura continué ses constants progrès en terme de cohésion et d'homogénéité. Le spectateur fidèle lui est redevable de nombreuses soirées de premier plan essentiellement dans le grand répertoire germanique (Tristan et Isolde de Wagner, Elektra et la Femme sans ombre de ) et les opéras modernes (l'Ange de feu de Prokofiev, le Rake's Progress de Stravinsky) ou des créations (inoubliable Julie de Bœsmans). Il aura fallu un peu de temps pour que le public bruxellois s'attache à cette personnalité moins directement communicative que celle d'Antonio Pappano, son prédécesseur. Pourtant, au fil des productions, la mayonnaise a pris entre le public et le chef. On ne peut que regretter, avec amertume, son départ pour Lyon, d'autant plus qu'après l'épisode tragi-comique de la non nomination de Mark Wigglesworth rejeté par l'orchestre, la formation n'aura pas, la saison prochaine, de chef permanent !

Pour cet ultime concert, Ono ouvrait la soirée avec Couleurs de la Cité céleste de Messiaen. Curieuse introduction avant un programme 100 % . Visiblement survolté, le chef appuie un peu trop sur la pédale des nuances ce qui permet aux vaillants cuivres de la phalange bruxelloise de mettre en avant leurs couleurs. Changement radical avec le, très rare, double concertino pour clarinette et basson de car l'oreille passe des montagnes de granit à la dentelle de Bruges ! Le chef aime cette musique et accompagne avec une grande finesse deux solistes de l'orchestre. Le clarinettiste Ivo Lybeert peine un peu à se libérer d'une certaine raideur, mais rentrant progressivement dans la pièce, il fait virevolter les notes dans un « rondo final » très enthousiaste. De son côté le basson de Dirk Noyen se fait délicat et léger.

Après cette mise en bouche, la pièce de résistance résidait dans la Vie de héros de Richard Strauss. Galvanisés par l'évènement, les musiciens livrent le meilleur d'eux-mêmes rivalisant de précision, d'écoute mutuelle et de virtuosité avec en prime un solo de violon spectaculaire mais un peu trop herculéen de . Toujours électrique, Kazushi Ono prend la partition à bras le corps. Certes les épisodes spectaculaires sont très bien caractérisés, mais le chef sait construire cette fresque et apporter une grande attention aux nuances. Conquis pas tant d'enthousiasme et de perfection, les auditeurs laissent exploser leur joie pendant les longues acclamations et la « standing ovation » réservée au chef !

Crédit photographique : Kazushi Ono © Johan Jacobs

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