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Claudio Abbado à Lucerne, le maître absolu de la grâce

Si le Festival de Lucerne qui se déroule cet été du 13 Août au 25 Septembre s'enorgueillit de la présence des plus prestigieux orchestres du monde entier (l'orchestre de Cleveland, de Chicago, de Saint Petersburg, le Wiener Philharmoniker …viendront cette année) il doit aussi sa réputation à l'excellence de l'Orchestra du Festival de Lucerne crée par le maître Abbado avec le désir de voir réunis dans une phalange d'exception les meilleurs solistes internationaux.

Après un premier programme donné dans le très chic «Konzertsaal» – une réalisation de l'architecte Jean Nouvel – le 13 Août en ouverture de l'édition 2008, l'Orchestre du Festival recevait pour sa seconde et dernière prestation de l'été la pianiste .

Les deux soirées données à guichet fermé débutaient par le Concerto n°2 en ut mineur de Rachmaninov, une œuvre qui d'emblée allait révéler la plénitude sonore et la sensualité du jeu très habité d' porté par la résonance et les effets chatoyants d'un orchestre qui ne se décline qu'au superlatif : la somptuosité des couleurs du pupitre des vents n'a d'égal que le velouté du chant des cordes auquel le maestro Abbado confère une élégance suprême. Emportée par cette houle orchestrale sur laquelle viennent s'inscrire les figures du piano, donne au premier mouvement un souffle lyrique très émotionnel. Après un mouvement lent tout en retenue expressive, le final impétueux renouvelle totalement ses couleurs en une matière sonore flamboyante et merveilleusement dosée.

La seconde partie du programme débutait par la Fantaisie orchestrale «der Sturm» de Tchaikovsky – écrite en 1973 d'après Shakespeare – une pièce idéale pour déployer tous les registres d'un orchestre éminemment virtuose. De la texture transparente des premières pages évoquant la mer, à l'emphase très éloquente de tout l'orchestre lorsque les deux amants s'abandonnent à l'enchantement triomphant de la passion, l'orchestre répond avec une implication extraordinaire à la conduite précise mais sans sécheresse et toujours «cantabile» du Maestro.

Il terminait ce concert prestigieux par la suite de 1919 du ballet «l'Oiseau de feu» de Stravinsky ; à la tête d'un orchestre d'une telle ductilité, Abbado jouait véritablement «sur du velours» avec la matière délicate et soyeuse des cordes, la fluidité des lignes et la souplesse aérienne des vents livrant des sensations visuelles, sonores et presque tactiles de cette évocation. Précédant «la danse infernale» interprétée avec une rigueur sans faille, «la ronde des princesses» était un instant de grâce absolue créant par les seules vertus du timbre, un climat sonore féerique.

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