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Les Quatre Saisons : une source qui ne veut pas se tarir

Il y a un an, l'ensemble Les Passions nous permettait de découvrir qu' pouvait encore offrir quelques divines surprises. Alors que depuis longtemps nous n'attendions plus rien des Quatre Saisons de Vivaldi, et son ensemble , nous démontre avec l'insolence de la jeunesse qu'il ne faut jamais jurer de rien, car rien n'est jamais acquis et que le baroque aime à se jouer du principe d'incertitudes. Voici la version, la plus belle, la plus magique de ce joyau que l'on croyait trop bien connaître.

Cadeau d'anniversaire du Festival de Sablé, qui fêtait ses 30 ans cette année, il fait partie d'un coffret (avec la Missa votiva zwv 118 de Zelenka, sur laquelle nous reviendrons ultérieurement, car les deux disques peuvent aussi être acheté indépendamment l'un de l'autre), qui nous démontre que la musique baroque n'a jamais été aussi enthousiaste et enthousiasmante, et que loin de s'éteindre son renouveau est permanent.

Les Quatre Saisons font partie de cette musique «à programme» ou «descriptive» qui conduisit au nom de l'imitation de la nature, comme ici des aboiements des chiens ou des mouches agaçantes, les violonistes italiens des XVIIe et XVIIIe siècle à toujours aller plus loin non seulement dans la richesse et la complexité de leurs compositions, mais à inventer de nouvelles manières d'interpréter, tout ce que le monde peut offrir de perceptions.

Ne se contentant pas du manuscrit le plus usité, la version imprimée par Le Cène en 1725, propose une relecture des Quatre Saisons s'appuyant sur d'autres sources dont «le manuscrit de Manchester» et sur le droit à la liberté de tout artiste à se libérer des habitudes.

Le résultat est foudroyant. Loin de l'imitation, cette musique se découvre sensible aux tourments de l'âme.

Des couleurs et des contrastes totalement inédits nouent un dialogue entre les musiciens de et la soliste, n'isolant pas le violon solo et créant ainsi une onde lumineuse. et , donnent à leur interprétation une virtuosité incandescente, qui va bien au-delà du geste. Libéré de toute pesanteur, elle est comme en état de grâce et sous nos yeux palpite un monde fait de vibrations, de mouvements ou l'élégance du geste musical éveille la perception du temps qui s'évanouit dans une Venise (à moins que ce soit Mantoue, ville où furent composées les Quatre Saisons) dont le réel est poésie de l'ineffable. On y retrouve tout le regard et le sourire d'Amandine Beyer à Sablé, lors du concert qui nous a permis de (re)découvrir ses concerti ; instants de grâce aussi impalpable que les reflets colorés de la lumière sur les feuilles d'automne, aussi insaisissable que la vibration de la chaleur de l'été, aussi mordant que le froid de l'hiver, aussi impatient de vivre que le Printemps renaissant, refusant l'inéluctable d'une mort toujours à l'affût.

Accompagnant ces Quatre Saisons, trois concerti, dont une version inédite au disque du concerto RV 372 écrit pour Chiara, l'élève préférée du maître.

Le plaisir des musiciens y est le nôtre.

Un grand merci au festival de Sablé et à Zig-Zag Territoires, d'avoir donné à de jeunes artistes, à une violoniste rayonnante, la possibilité de nous rendre un chef-d'œuvre que l'on croyait perdu.

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