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Marc Scoffoni & Delphine Bardin, jeunes et accomplis

Il est toujours agréable de découvrir de jeunes artistes, surtout quand ils allient la fraîcheur avec une technique accomplie. et répondent tout à fait à cette description. Le seul reproche sérieux qu'on puisse adresser au premier concerne le manque d'homogénéité entre ses graves chaleureux et ses aigus presque ténorisants. Le timbre, animé par un vibrato rapide, est au demeurant séduisant, et la présence excellente, tout comme la diction et la capacité à nuancer une voix d'ampleur limitée : bref, possède déjà le profil et les qualités d'un liedersänger.

Quant à , elle montre un toucher d'une grande délicatesse, ainsi qu'un vrai talent d'accompagnatrice. Son jeu très étudié convient à Schumann, surtout dans les étranges Variations symphoniques posthumes. Ces pièces, écartées par Clara Schumann de l'édition autorisée, surprennent par leurs divagations gracieuses et mélancoliques : on a l'impression d'entendre ce qu'aurait écrit Chopin guetté par la folie.

Les Amours du poète sont un choix audacieux pour de jeunes interprètes, tant ce sommet du lied romantique reste d'une difficulté redoutable, y compris sur le plan vocal. La lecture proposée ne manque ni d'émotion, ni de subtilité, et le ton volontiers sentimental rappelle les barytons français Charles Panzéra et Gérard Souzay. Cette interprétation très narrative convient toutefois moins bien à l'ironie amère de Heine qu'aux Songs of travel. Les poèmes de Stevenson, l'auteur de L'île au trésor, dépeignent un voyageur simple et rêveur, qui contemple le paysage plutôt que de déplorer l'amour perdu. Il s'agit du premier cycle de mélodies composé par Vaughan Williams, entre 1901 et 1904, c'est-à-dire lorsqu'il était encore un apprenti compositeur ayant fait ses classes à Londres et à Berlin. Cette œuvre contient toutefois des beautés mélodiques et des subtilités harmoniques fondées sur une connaissance intime des folksongs, et cette alliance entre une expression wagnérienne et des influences populaires rappelle les lieder contemporains de Mahler. On peut remercier et d'avoir si agréablement rappelé que Vaughan Williams était mort il y a juste cinquante ans, un anniversaire qui, jusqu'ici, est passé totalement inaperçu à Paris.

Crédit photographique : Marc Scoffoni © DR

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