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Le voyage continue !

Orchestre Philharmonique de Liège

Ce second concert de l'OPL, articulé autour de la musique française débutait par un nouveau clin d'œil à la tournée de l'orchestre en Amérique du Sud. Moins connues que sa trilogie romaine, Les Impressions brésiliennes de Respighi, commande de l'orchestre de Rio en 1927, emportent le public outre-Atlantique à travers trois tableaux évocateurs. La Nuit tropicale emploie les langoureux phrasés chromatiques caractéristiques de l'écriture du compositeur. Ce tableau sobre et nuancé développe de subtiles couleurs auxquelles donne vie avec beaucoup de poésie. Impressionné par sa visite à l'Institut Butantan consacré à l'élevage et l'étude de serpents, Respighi propose comme tableau central une partition digne d'accompagner les plus effrayants films d'épouvante dédiés aux créatures rampantes. Rophé, dans une direction plutôt rapide transforme davantage le film d'épouvante en série z, le thème du Dies Irae renforçant encore cet aspect « second degré ». Ces pages amusantes, au delà de leur aspect ludique, font la démonstration de l'excellente technique de chacun des pupitres de l'orchestre. Enfin, les rythmes de samba et le chant du hautbois très en verve ce soir, ponctué des sons de cloches en tutti avec harpe et piano marquent avec malice la fin d'un bien trop court voyage.

La collaboration entre l'orchestre et l'organiste n'est pas nouvelle, l'ensemble et le soliste ayant enregistré avec beaucoup de succès la Symphonie n°3 de Saint-Saëns chez Cyprès. Nous étions dès lors heureux de les voir à nouveau réunis autour du Concerto pour orgue, orchestre à cordes et timbales de Poulenc. Même si se voit confier un instrument magistralement restauré, dominer ce colosse depuis sa console électrique mobile requiert une extrême dextérité. Le soliste et l'ensemble de cordes évoluent à travers une balance orgue-orchestre entièrement maitrisée et la réactivité dont fait preuve l'organiste donne toute sa fougue à la musique de Poulenc. Si on a parfois l'impression qu' court après ses notes dans l'Allegro agitato, la beauté du chant proposé dans les atmosphères plus éthérées et la capacité à faire fusionner la sonorité de l'orgue à celle de l'orchestre nous offrent un grand moment de musique. Les dernières mesures, où dialoguent l'orgue et l'altiste-soliste de l'orchestre et ensuite le cello, sont simplement bouleversantes. A la suite de cette intense performance, Olivier Latry est longuement ovationné par le public qu'il remercie d'un bis.

On retrouve ensuite avec plaisir le précieux sens analytique de à travers les Métaboles de Dutilleux. Il y décortique avec succès le brillant jeu de construction du compositeur mettant en évidence chaque grande famille d'instruments à travers un ensemble de transformations aboutissant à une métamorphose complète du matériau musical. Le chef d'orchestre se montre tout aussi rigoureux dans la Valse de Ravel, qu'il dirige sans partition. Par une solide vision d'ensemble, il distille petit à petit toute la folie qui anime cette valse jusqu'à son final explosif.

Ce programme éclectique, présenté sans aucune faiblesse s'est révélé passionnant de bout en bout et confirme l'excellence de la phalange liégeoise et de son directeur musical dans le répertoire du XXe siècle.

Crédit photographique : Olivier Latry © Notre-Dame de Paris

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