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Bach par Hélène Grimaud

Comme tous les ans depuis son passage chez le label « jaune », se retrouve au centre de l'actualité musicale dès la sortie d'un nouvel enregistrement. Si Deutsche Grammophon ne lésine pas sur les moyens publicitaires, c'est que les quelques 100 000 exemplaires vendus en moyenne par son artiste vedette constituent une manne bénie dans les ventes du secteur Classique.

Après Beethoven, voici un tout nouveau programme « Bach » où des pièces « originales » sont agencées par tonalité aux côtés de transcriptions.

Dès la première écoute, c'est l'évidence même : la qualité de recueillement et la justesse de ton, sont de toute beauté. Ce qui se dégage du jeu d' rappelle d'ailleurs l'intensité de son disque Erato consacré aux derniers opus de Brahms.

La première plage, le Prélude n°2 du Premier Livre du Clavier Bien Tempéré, nous prend cependant à froid par son climat agité dans lequel l'articulation assez mécanique file à toute allure. A l'opposé, la dynamique entêtante du Prélude en la mineur captive et devient obsessionnelle. Véhémente, la fugue qui suit est de la même veine. Toujours ce toucher « parlant » qui porte dans la Fugue en ré mineur. Dans le Prélude n°4, le travail des couleurs et des timbres est conduit avec lisibilité et souci de dosage : un chant poétique parcourt toutes les lignes. Enfin, la tension de la fugue est soutenue et croît avec minutie pour culminer magnifiquement en fin de crescendo.

Inscrit dans une intemporalité saisissante, le Concerto n°1 est marqué par l'élan vibrant insufflé par le piano. Avec verve mais aussi finesse, celui- ci occupe pleinement l'espace, laissant peu de place au dialogue avec l'orchestre de chambre de Brême. La prise de son relègue malheureusement au deuxième plan la prestation de l'orchestre pourtant à l'unisson avec les intentions de la soliste. Etonnant choix technique, d'autant que la réalisation est de grande qualité!

Du côté des transcriptions figure la Chaconne, probablement un des sommets du disque. Toute en contrastes, elle est loin du dépouillement qui caractérise l'esprit baroque. Chaque variation devient un prisme empreint de religiosité et revêt une dimension symphonique. Le Bach/ Rachmaninov et ses couleurs vivifiantes amène, quant à lui, davantage de lumière au milieu de toutes ces tonalités graves. Autre perle : le Bach/Liszt dont la retranscription magnifie à l'extrême la richesse harmonique de ce monument. La mélodie s'étire et explore les contours d'une texture polyphonique qui nous entraine vers des sommets volcaniques. Surgissent ainsi des tréfonds du clavier des basses d'une ferveur et d'une gravité émouvantes. Les teintes sont inhabituelles chez la pianiste – intériorisée, le début de la Fugue résonne avec une transparence cristalline.

Cette version là justifie à elle seule l'acquisition de cette nouveauté qui a bel et bien sa place parmi les références du genre.

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