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Altre Stelle, première pour Juliette Deschamps et Anna Caterina Antonacci

Il s'agit avec ce spectacle en forme de pasticcio de la deuxième collaboration entre la metteur en scène et la cantatrice .

On avait encore en mémoire le magnifique spectacle Era la notte, donné sur un assemblage musical de pièces italiennes du début du XVIIe siècle (Monteverdi, Strozzi, Giramo…), et sur fond de rideau de cierges…

Le spectacle produit aujourd'hui au Grand-Théâtre de Luxembourg propose encore plus de cohérence dans le choix des répertoires et dans le traitement de la théâtralité. La citation du chant XXXVIII du «Paradis» de Dante établit en effet la métaphore qui unit ces «autres étoiles» à toutes ces femmes de l'opéra classique et romantique bafouées, humiliées, outragées… et parfois même vengées. Le personnage féminin, magnifiquement habillé par , évolue dans un espace à la fois ouvert et clos, selon la lecture qu'on donnera à la ligne de fuite, et qui n'exclut pas quelques échappées latérales. La présence sur scène de deux jeunes enfants enrichit considérablement la thématique de la femme abandonnée, les tourments de l'amante se doublant de ceux de la mère et de ceux de la meurtrière en devenir. Les éclairages raffinés de Nelson Wilmotte contribuent au climat de plus en plus tensif qui habite la scène, et dont le sommet expressif est très certainement atteint avec cette superbe mort de Didon.

Le programme concocté pour la circonstance est d'une remarquable cohérence thématique et musicale, et établit toutes les passerelles esthétiques qui relient Rameau à Berlioz, sans omettre de passer par les cases Gluck, Méhul et Cherubini. L'ensemble Les Siècles, placé sous l'habile direction de , est des plus convaincants.

Dans un tel programme, dédié avant tout à la déclamation tragique, fait littéralement merveille. Son puissant soprano n'était sans doute pas à son meilleur dans les pièces qui composaient le précédent spectacle. Ici, les options esthétiques de la sélection musicale lui permettent de donner libre cours à son tempérament dramatique, et de libérer un instrument dont les couleurs parfois volontiers rauques animent tous les états de la passion. On n'oubliera pas de si tôt sa sublime incarnation de Médée. De même, si sa Cassandre du Châtelet, dans la mise de scène de Yannis Kokkos aujourd'hui disponible en DVD, avait marqué les esprits, sa Didon paraît presque plus belle encore, et on ne peut qu'espérer l'applaudir un jour dans ce rôle.

Pour cette extraordinaire interprétation, pour la beauté et la cohérence de ce spectacle, on ne peut que souhaiter le renouveau de la tradition ancienne du pasticcio.

Crédit photographique : © Christophe Olinger

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