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Jacqueline du Pré, le plus grand amour et la plus grande tristesse

«Le plus grand amour et la plus grande tristesse» : le titre du récent film de consacré à Schubert résume aussi le destin de la radieuse violoncelliste , dont la carrière fut brisée à 28 ans par la maladie.

La publication de cet hommage, composé de deux films et de deux séquences inédites, répond, selon l'auteur, à un double objectif : il veut offrir au public le matériau qu'il n'avait pas pu utiliser dans son précédent film, in portrait ; il souhaite aussi combattre des «légendes» qui la concernent. Nupen vise certainement un livre et un film qui, par leurs révélations sur la vie privée de , ont suscité les protestations de ses proches.

Le premier film entend donc dresser un portrait authentique de l'artiste. De ce traditionnel défilé d'intervenants filmés devant une plante ou une bibliothèque, on retient surtout les propos du violoniste Pinchas Zuckermann, qui explique que «ce n'était pas du violoncelle qu'elle jouait», mais qu'elle s'exprimait tout entière par la musique. Les images d'archives la révèlent d'ailleurs tout aussi éloquente au violon et au piano, malgré une technique peu orthodoxe, et le violoniste Hugh Maguire la décrit même domptant une balalaïka dans un restaurant moscovite. Son énergie anime aussi les joyeuses séquences de répétition du Quintette «La Truite», avec Itzhak Perlman, , Pinchas Zuckerman et Zubin Mehta (à la contrebasse), sans oublier Janet Baker, qui se joint à eux pour un «bœuf» schubertien : à sa façon, cette génération d'interprètes aussi talentueux que décontractés participait elle-aussi à l'esprit du Swinging London.

Les mélomanes trouveront plus de musique dans le second film, même si les extraits sont bien courts. Les seuls mouvements entiers proviennent d'œuvres qui ont heureusement été filmées dans leur intégralité par (le Trio «des Esprits » de Beethoven, le Concerto pour violoncelle d'Elgar, tous deux disponibles en DVD). De charmants duos avec son professeur William Pleeth donnent à penser qu'elle lui doit le jeu d'archet généreux et le vibrato ample qui la caractérisent. Quant aux duos avec Daniel Barenboïm, son époux, ils montrent l'alliance de deux virtuosités au service du dialogue musical le plus accompli.

Les deux séquences inédites présentent avant tout un intérêt documentaire. La première est un enregistrement privé du premier mouvement de la Sonate n° 1 en mi mineur de Brahms, une œuvre que l'on connaît déjà dans l'enregistrement de studio pour EMI, plus assuré techniquement. Le second document est un entretien réalisé en 1980, dans lequel Jacqueline du Pré, déjà très diminuée, répond avec une terrible lucidité aux questions de .

Malgré la brièveté des séquences musicales et de surprenantes erreurs dans les sous-titres («J'ai pris des leçons avec Casals à Zermatt» devient «J'ai pris des leçons avec Casals et Zermatt» !), ce DVD vaut comme un beau témoignage de fidélité et d'admiration envers une artiste inoubliable.

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