- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Une somptueuse première avec l’Olrap

Olrap,

C'est donc ce petit jeune homme, frère de Musset ou de Lamartine, entrant en scène presque timidement, qui a réuni sur son nom une salle aussi importante ? C'est ce petit jeune homme – à côté de l'immense – qui transporte les foules ? On y croit à peine… Mais il suffit de quelques mesures, à peine, pour que le petit jeune homme, oui, devienne, le grand .

Il avait choisi de jouer Dvořak, qu'il vient juste d'enregistrer (le disque sortira fin février chez Virgin). Il nous avait dit quelques jours plus tôt : «Ce concerto est « la » pièce maîtresse du répertoire du violoncelle – avec, évidemment, les Suites de Bach – ; elle représente l'instrument de façon héroïque : après un grand « tutti » initial – la plus longue introduction qui soit -, le violoncelle entre, majestueux, royal. Ce concerto, assez long, suscite un grand nombre d'émotions, et développe des thèmes folkloriques dans le final».

De la prestation, nous ne saurions faire aucun commentaire technique, tant la qualité était au-delà de toute critique. Nous avons oublié d'»écouter», nous nous sommes laissé emporter, comme tout le public ce soir-là… Certains ont noté mezzo voce un pathos très romantique, des mouvements ou des mimiques excessifs, très cabotins (?) dans le jeu du soliste ? Pfff… Nous n'avons vu nous-même que le bel instrument, un violoncelle de Matteo Goffiler, de 1701, en prêt depuis une dizaine d'années grâce à des mécènes, «un instrument très sauvage», dit l'artiste, qu'il lui a fallu «apprivoiser peu à peu» ; un instrument aux reflets chatoyants, aux couleurs profondes, à la voix proprement bouleversante. Nous n'avons vu que l'instrument, nous n'avons entendu que l'artiste. Ou plutôt non : nous n'avons vu qu'un seul artiste, Gautier et le violoncelle, enlacés comme deux êtres vivants, fondus comme un couple, vibrant des mêmes accords.

Nous en omettrions presque la première partie du concert, et ce serait foncièrement injuste. Car, pour précéder ce concerto en forme de symphonie, – puisque le dialogue avec l'orchestre y participe à l'excellence du soliste -, , toujours pédagogue, avait choisi des «variations». Sur une forme somme toute classique, un thème et ses diverses facettes, nous avons pu apprécier deux compositeurs bien différents, Brahms et Lutoslawski, séparés par un siècle et des styles différents, mais offrant tous deux une façon nouvelle d'aborder et de traiter cette forme.

Brahms – ami et mentor de Dvořak -, dans cet hommage à Haydn, montre son propre talent, dans le contrepoint et l'harmonie ; le thème est repris, comme inversé dans un miroir. Quant à Lutoslawski, «le compositeur polonais le plus célèbre après Chopin» suivant les termes mêmes du chef, quelle virtuosité ! Cette œuvre écrite en début de carrière, débordante de multiples couleurs, a offert à l'orchestre une magnifique palette pour exprimer la qualité de chacun des pupitres.

Si tous les mélomanes ne se précipitent pas pour acheter l'enregistrement de dès sa sortie, ou ne réécoutent pas Brahms et Lutoslawski, nous voulons bien n'avoir rien compris à cette soirée…

Crédit photographique : © M. Tammaro / Virgin Classics

(Visited 150 times, 1 visits today)