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Le violoncelle selon Reger, premier volet

, aujourd'hui surtout connu des organistes, fut très admiré de son vivant comme compositeur, interprète et pédagogue, mais il a été depuis éclipsé par des figures plus novatrices de l'Allemagne postromantique, en particulier Richard Strauss, Mahler et Schœnberg. On range souvent ce singulier talent parmi les épigones de Brahms, à moins qu'on ne le taxe d'académisme, à cause de sa vénération pour Bach et Beethoven. Consacré à des pièces pour violoncelle et piano de la première moitié de la carrière de Reger, ce disque contient dix œuvrettes finement ouvragées et deux sonates d'une tout autre envergure. Les premières font penser aux pièces de salon de Schumann et de Tchaïkovski. Certaines sont des transcriptions, dont on ne comprend pas bien la présence : la notice ne donne aucune explication sur ce choix, alors que des transcriptions réalisées par le compositeur lui-même sont absentes, ce qui paraît curieux dans le cadre d'une intégrale de l'œuvre pour violoncelle. On peut notamment entendre la ravissante Berceuse de la Vierge Marie, certainement le lied le plus célèbre de Reger.

La première Sonate, écrite en 1892, montre une parfaite appropriation du langage brahmsien, même si le discours peine à trouver l'unité souveraine du maître, et si le piano noie parfois le violoncelle sous des avalanches dignes de Liszt. Quoique inaboutie, l'œuvre est admirable pour la qualité des mélodies, la densité du contrepoint et la constance d'une inspiration qui évite toute référence folklorique. Plus équilibrée et moins cyclothymique, la Sonate en sol mineur (1898) permet d'apprécier la complexité du tissu musical, dont les lignes, déjà sinueuses en elles-mêmes, sont travaillées par un chromatisme généralisé. Cependant, le mouvement final, comme la belle Aria de la Suite en la mineur, annonce par sa pureté l'évolution de Reger vers un style plus dépouillé.

Malgré des sonorités parfois un peu forcées de la part du violoncelliste, et donnent des sonates une interprétation remarquable de cohésion et d'acuité, évitant d'alourdir une musique toujours chargée de mélancolie, même dans les passages plus légers. L'aisance technique et l'agilité expressive leur permettent de rendre justice également aux pièces de genre. Ce premier volume de l'œuvre pour violoncelle est donc une franche réussite.

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