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Funeral Teares, la musique unique remède à la mélancolie

Alors qu'en 1621, paraît l'Anatomie de la Mélancolie de Burton, une des premières tentatives de la médecine moderne de mieux comprendre et soulager à l'aide d'artifices scientifiques ce mal qui ravage les âmes et les cœurs, , compositeur anglais au nom italianisé, fait de la musique son » remède souverain ». Dans un pays rongé par la violence, par la précarité de la vie et des songes, sa musique illustre des évènements qui permettent de percevoir notre humaine faiblesse. Déplorant la mort d'hommes illustres (comme l'héritier du trône), ou de l'être aimé… les mots et la musique deviennent l'expression de cette intime douleur que la mélancolie libère, laissant le deuil trouver sa place dans son refus désespéré. « La musique adoucit, certes, la douleur / en rien elle n'empêche les lamentations / Elle s'y abandonne comme une passion… ».

Construit en trois partie, Songs of mourning, the masques of squires et Funeral teares, ce CD nous permet de découvrir tous les aspects de cette mélancolie que la société anglaise du XVIIe siècle cultivait comme un art de vivre.

S'accompagnant avec l'infime discrétion de ce mouvement léger, presque imperceptible des voix des violes, de la plainte de la harpe et du luth au raffinement courtois, – Quentin et nous permettent de nous abandonner pour un temps, seul ou en duo, à ce désespoir, qui nous invite à renoncer à lutter pour mieux le savourer (« il est vain de lutter contre le destin »). L'un et l'autre goutent les mots comme s'il s'agissait d'ambroisie, et dans un anglais « restitué » au phrasé gouleyant, nous donne à voir où à boire, ces instants où l'on pressent que le temps nous est compté. Le timbre clair et lumineux d' – Quentin devient le miroir de la nuit et de l'innocence aux charmes célestes. Celui de si étrange et fascinant dès l'ouverture de CD, dans O Grief (Ô douleur), rend perceptible et hypnonisante cette fascination « morbide » de la mélancolie. Et c'est vraiment dans la troisième partie dans ces ayres chanté en duo de Funeral teares que leurs timbres en s'unissant, en un contrepoint harmonieux, révèlent la sombre clarté des amours perdus « faut-il que tu perdes l'ombre de ta joie ».

Une prise de son claire met en valeur l'équilibre entre les instrumentistes auxquels d'ailleurs une partie du programme offre de beaux dialogues, et les deux interprètes vocaux. Seul regret, l'illustration du CD évoque beaucoup plus la mélancolie romantique que baroque et le livret dans lequel n'est que sommairement évoqué cette perception du monde où tout fuit et s'enfuit. Une fuite qui laisse à l'être humain la douloureuse conscience de la transparence et la fragilité inévitables de son essence.

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