- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Variations Enigma par Colin Davis, treize personnages en quête d’auteur

Spécialiste incontesté de Berlioz et grand interprète du répertoire germanique de Mozart à Mahler, Sir aborde depuis quelques années la musique anglaise, qu'il avait jusqu'alors peu fréquentée, hors Britten, Tippett, Walton et MacMillan. Il avait certes déjà gravé, au début de sa carrière, les Variations Enigma (en 1964 pour Philips), mais cet enregistrement n'est plus disponible en CD. Cette nouvelle version vient s'ajouter aux enregistrements des symphonies d' et de son oratorio The Dream of Gerontius, également issus de concerts avec le .

L'exposé du thème, respectant soigneusement les indications de rubato, paraît de bon augure, mais cette lecture ferme et précise montre rapidement ses limites. Le compositeur lui-même a laissé le témoignage (disponible chez Emi et chez Naxos) d'une fantaisie poétique et d'une verve bonhomme qui font défaut ici. Sans la capacité d'animer cette galerie de treize personnages, mais aussi d'exprimer la tendresse amusée de l'artiste, l'intérêt de cette œuvre singulière se limite à une prodigieuse habileté d'orchestration. L'interprétation de Sir reste néanmoins de grande qualité, grâce à des tempos généralement vifs et à une palette homogène et chaleureuse. Certaines variations délicates sont très réussies, notamment la dixième (« Dorabella ») et la dernière (« E. D. U.  », c'est-à-dire Elgar lui-même), qui exalte sans lourdeur la confiance que l'artiste puise dans l'affection de ses proches. En revanche, les deux variations les plus mélancoliques, les n° 9 (« Nimrod ») et 13 (« *** ») tombent un peu à plat, notamment par la faute de violons manquant d'étoffe. Cette version de l'œuvre ne s'inscrit donc pas parmi les meilleures, qui sont nombreuses, et le a certainement fait mieux avec Pierre Monteux (Decca). Pour les amateurs de SACD, toutefois, le choix se limite à cette version et à celle de Paavo Järvi.

L'Introduction et Allegro est une délicieuse sérénade pour cordes, augmentée d'un robuste passage fugué. L'œuvre est spécialement reliée au LSO, puisqu'Elgar l'a composée pour éprouver la virtuosité des cordes de cet orchestre, qui venait d'être fondé en 1905. Sir en donne une lecture vibrante et tonique, mais quelques imperfections conduisent à préférer l'opulente interprétation de John Eliot Gardiner avec le Philharmonique de Vienne (DG), qui propose, outre de très bonnes Variations Enigma, d'intéressants compléments de programme.

(Visited 545 times, 1 visits today)