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Vesselina Kasarova, welcome to the chest voice

s'est illustrée dans les répertoires baroque, classique et romantique. Elle aborde ici des rôles d'un format plus lourd et d'une tessiture tendue.

Les notes les plus aiguës (jusqu'au do bémol dans «O don fatale») manquent d'éclat et semblent artificiellement réverbérées. Les notes graves, en revanche, ne lui posent aucun problème, et la chanteuse se complaît à produire dès que possible des sons «poitrinés» particulièrement impressionnants. On est en droit de trouver ce procédé pénible et vulgaire, mais rien n'interdit son usage dans ce répertoire, et il est quasiment indispensable dans Cilea et Mascagni. En l'occurrence, même si la voix ne sonne pas caverneuse et conserve son homogénéité, le grossissement abusif du registre grave s'accompagne de nombreux sons pris «par dessous», au détriment parfois de la justesse.

Forte de cette générosité vocale, s'emploie à donner aux airs dramatiques une expression tourmentée. Par ailleurs, elle déploie son art du chant orné dans les trilles de «Stride la vampa» et dans les colorature de La chanson du voile de Don Carlo. La souplesse féline et le style incisif sont appréciables, même si, en Azucena, Marylin Horne (Decca), a obtenu par les mêmes moyens un effet encore plus étonnant. Dans La chanson du voile, certaines libertés rythmiques ressemblent un peu trop à de la négligence. Les airs les plus réussis sont en fait ceux dans lesquels la chanteuse peut utiliser son timbre corsé pour incarner un personnage, compensant par la volupté de la ligne de chant une prononciation très perfectible. Elle peint ainsi une touchante Jeanne d'Arc (de Tchaïkovski), une Santuzza étonnamment séduisante et une Dalila langoureuse, bien soutenue par un orchestre qui réussit enfin à s'élever au dessus d'une efficace routine. Mais sa volonté de créer une Carmen irrésistible la pousse à de regrettables excès, qui rappellent les tristes exemples d'Anna Moffo (RCA) et de Leontyne Price (Decca). Avec ses accents très particuliers («Dâwôn José») et ses vilaines notes aspirées («Mon hamoureux, il est au diâââble»), cette bohémienne ne craint ni la pacotille, ni le mauvais goût («Cela montait, montait, montait» etc. ). Dans le duo du second acte, partage ce style imprécis et laborieux qui défigure si souvent l'œuvre.

On voudrait passer rapidement sur la notice, qui, pour ce genre de récital, n'a pas grande nécessité. Mais, après avoir vainement tenté de justifier le titre de l'album par une prétendue cohérence du programme, l'auteur entreprend de résumer chaque opéra, et, entre autres maladresses, il avance que, dans Le trouvère, Azucena ignore si elle a jeté au feu son propre fils ou celui du Comte de Luna : le livret du Trouvère est certes rocambolesque, mais pas complètement absurde !

A qui recommander ce récital ? Les fans l'ont déjà acheté. Pour les autres, tout dépend de leur capacité à faire abstraction d'un style discutable pour apprécier une personnalité et une voix peu communes.

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