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Ensemble Intercontemporain, multiplicité des sources sonores

En ouverture de sa saison 2009-2010, l' sous la conduite de proposait un programme très alléchant inscrit dans la thématique «Babel, la diversité des langues» courant du 25 septembre au 3 octobre à la Cité de la Musique.

La soirée débutait avec Intégrales (1925) d', un compositeur particulièrement fêté en ce début de saison puisque l'on entendra l'ensemble de son œuvre en deux concerts à Pleyel le week-end prochain, dans le cadre du Festival d'automne. Dans cette partition emblématique où les cordes cèdent la place aux percussions, met à l'œuvre l'idée de projection du son qui l'obsèdera sa vie durant. À La direction précise et énergique de répond la fulgurance des timbres de l', sonnant haut et clair dans l'espace de la Salle des concerts pour profiler des colonnes d'accords impressionnants et donner à l'œuvre sa pleine dimension architecturale.

Beaucoup moins concise et unitaire, la pièce au titre un rien obscur de Barbarismes – trilogie de l'an mil – est une œuvre mixte («une sorte d'imagerie médiévale» souligne le compositeur) dans laquelle le support électroacoustique vient relayer les quatorze instruments – dans les deux interludes «paysagistes» qui articulent ce triptyque – ou s'insérer dans l'écriture instrumentale pour créer un contrepoint tout en aspérités. Favorisant les ruptures de ton et les contrastes, la musique de Jodlowski charrie des matériaux hétérogènes dont on perçoit parfois difficilement le fil narratif. N'empêche qu'elle peut réserver de vraies trouvailles sonores tel ce « hoquet » crépitant qui débute la troisième partie (« le Roi) ou cette dernière « image sonore » habitée par les résonances d'un piano détempéré que projettent les haut-parleurs sur le commentaire très poétique des instruments.

Si Passaggio de , que l' donnait il y a quelques mois sur cette même scène de la Cité, défie le genre de l'opéra, Laborintus II (1963-1965) du compositeur italien est «une sorte de théâtre pour les oreilles» (surtitré d'ailleurs) mêlant, comme il aime à le faire, la multiplicité des sources sonores : la parole d'un récitant/acteur – envoûtant Fosco Perinti – s'inscrivant sur fond instrumental ou électroacoustique, le chant de trois voix féminines (Valérie Philippin, Laurence Favier et Valérie Rio) jouant parfois la comédie, et huit «acteurs», sorte de chœur de «turba» (celui d'Axe 21) réagissant de manière bruyante aux sollicitations du texte d'Edoardo Sanguinetti. Aux poèmes de son propre ouvrage Laborintus, le fidèle collaborateur de Berio joint ceux de la Bible, de Dante et de Pound. Tout y est à fleur de sensibilité avec ce rien de distanciation et d'humour qui colorent ce spectacle auriculaire. L'espace de liberté laissé par Berio aux interprètes – théâtre musical oblige – est assumé ici avec tact et fantaisie sous la baguette vigilante de et laisse cohabiter, au sein du labyrinthe inextricable de la pensée, la gravité de ton et la légèreté de la rappresentazione.

Crédit photographique : Susanna Mälkki © Simon Fowler

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