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Les concerts d’adieux d’Alfred Brendel

En novembre 2007, à l'âge de soixante-seize ans, et en pleine possession de ses moyens, annonçait dans le Chicago Tribune son retrait de la scène internationale à la fin de l'année 2008.

Lors de sa tournée d'adieux, après une carrière de près de soixante ans, le pianiste se produisit notamment à Vienne en concerto et à Hanovre en récital dans son répertoire de prédilection : Mozart, Beethoven et Schubert. Ce sont ces deux concerts que publie aujourd'hui Decca. Aucune œuvre interprétée lors de ces concerts n'est inédite dans la discographie du pianiste, Brendel les ayant même enregistrées à plusieurs reprises (trois versions de la Sonate D. 960 de Schubert en disque, plus une en vidéo !), que ce soit chez Vox, Vanguard ou Philips.

Pour son ultime concert au Musikverein de Vienne, le pianiste autrichien, avec une certaine malice, avait choisi d'interpréter le Concerto «Jeunehomme», du nom de la dédicataire, Mademoiselle Jeunehomme, premier grand concerto pour piano que Mozart compose en 1777, il a alors vingt-et-un ans. Brendel développe un son feutré, archi contrôlé, comme à l'accoutumée, mais les pointes d'humour ne sont pas absentes (premier et troisième mouvement), tout comme la douleur qui émane de l'andantino en ut mineur, pris dans un tempo retenu, ou la fougue que l'on retrouve dans le troisième mouvement. Accompagnement vivant et attentif de Sir (un autre jeune homme de quatre-vingt-trois ans !) à la tête des musiciens du Wiener Philharmoniker.

Les autres œuvres de ce disque proviennent de son dernier récital donné quelques jours auparavant à Hanovre. Dans les fameuses Variations en fa mineur de Haydn, Brendel n'en rajoute pas dans le pathos, c'est chantant, dans un tempo allant. On retrouve les qualités de clarté, lisibilité, fluidité dans la Sonate K 533/494 de Mozart et la Sonate n°13 de Beethoven, mais aussi la vivacité, notamment dans le mouvement final d'aspect fugué de la sonate de Beethoven. clôturait ce récital par l'ultime Sonate D. 960 de Schubert, composée deux mois avant sa mort. C'est très élégant, contrôlé, mais pas froid, que ce soit le thème inoubliable du premier mouvement et ses modulations, le recueillement mais aussi la sérénité qui se dégagent de l'andante, la fraîcheur du scherzo. Brendel aborde le dernier mouvement avec espièglerie, vivacité mais aussi beaucoup d'autorité dans le final.

Decca nous gratifie également de plusieurs bis donnés par le pianiste lors de ce concert, bis anti-spectaculaires à l'image de ce programme, notamment l'apaisant Choral-Prélude «Nun komm'der Heiden Heiland» de Bach dans l'arrangement de Busoni.

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