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Boulez face à Mahler et Wagner

Alors que Sony édite, en plusieurs, coffrets l'intégrale des enregistrements de (lire ici la chronique du coffret Boulez dirige Boulez), il est intéressant de réentendre des enregistrements du maître dans des répertoires qui étaient, dans les années 1970, en marge du catalogue des œuvres qu'il dirigeait alors. C'est également cette décennie qui marque l'affirmation du musicien comme chef d'orchestre de renommée internationale avec des mandants consécutifs à la tête de l'orchestre de la BBC de Londres (1971-1976) et du philharmonique de New York (1971-1978). Dès lors, le chef élargit un répertoire, surtout centré sur les œuvres contemporaines et s'invite chez Wagner, Berlioz, Mahler, Dukas, Haendel, Beethoven (Boulez a même enregistré la symphonie n°5 du compositeur avec le New Philharmonia !)…

De ces gravures Mahler/Wagner, partagées entre Londres (mais le LSO) et New York, les collectionneurs avaient plutôt retenu l'enregistrement du Klagende Lied (1881) qui fit grand bruit. En effet, propose l'intégrale de la partition, c'est à dire dans sa version originale et avec la première partie « Waldmärchen » qui fut supprimée lors d'une révision, en 1888. Longtemps oubliée, cette édition ne fut redonnée, dans sa globalité, qu'en 1934 à Brno. qui en proposa les premières auditions aux Etats-Unis et en Grande–Bretagne en livre une interprétation directe et précise qui s'appuie sur une distribution vocale de premier plan. La direction incisive du chef évite de trop s'attarder sur les faiblesses d'une œuvre d'un compositeur, parfois maladroit, à la recherche d'un style. Malgré la multiplication des versions au cours des années 1980-1990, cette interprétation reste le maillon essentiel de la discographie.

On ne se souvenait pas de ces deux cycles de lieder de Wagner et Mahler, enregistrés à New York, en 1971. Pourtant, la justesse stylistique et l'aisance vocale d' et l'attention de l'accompagnement imposent une belle version. En complément de ces pièces, on trouve la très oubliable Cène des Apôtres, partition de circonstance.

Pierre Boulez avait marqué son époque en dirigeant Parsifal à Bayreuth (de 1966 à 1970). Dès lors, il est intéressant d'entendre le chef dans ce répertoire avant qu'il ne s'attaque à la Tétralogie du centenaire avec Patrice Chéreau (à partir de 1976 à Bayreuth). Boulez qui dirige, tout en nerfs, et avec une pointe sèche, doit se coltiner une formation revêche et pauvres en couleurs ! Mais à la différence d'un Solti qui pouvait compter sur la philharmonie de Vienne pour renouveler l'interprétation wagnérienne, Boulez est forcé de gérer un orchestre rugueux et râpeux à souhaits (et la prise de son n'aide guère !). On peut donc entendre, un Wagner expérimental et dégraissé en laboratoire, qui passe mieux dans l'intimité de Siegfried Idyll que dans les ouvertures de Tannhäuser et des Maîtres chanteurs.

Un coffret, inégal, mais toujours intéressant et surtout ultra-écomique à l'achat. On peut donc se dire qu'on achète une version majeure du Klagende Lied agrémentée d'une belle version des Rückert-Lieder et des Wesendonck-Lieder et avec un disque d'ouvertures en bonus ! Curieusement, Sony n'a pas ressorti de ses archives l'Adagio de la symphonie n°10 de Mahler enregistré dans la foulée des sessions du Klagende Lied et qui figurait en complément sur le coffret discographique d'alors !

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