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La quête de l’inouï de Nikolaj Znaider

Le Concerto pour violon op. 61 d' dure une petite cinquantaine de minutes. Pour cette raison, il est peu prisé des programmateurs de concerts et rares sont les violonistes qui s'y attaquent. Composée pour Fritz Kreisler, l'œuvre fut créée par celui-ci le 10 octobre 1910 au Queen's Hall de Londres (détruit en 1941 sous les bombes allemandes). C'est sur le Guarneri del Gesu que jouait Kreisler ce soir-là que Nikolaj Znaider enregistre, cent ans plus tard, cette page splendide quoiqu'un peu old-fashioned –ce qui participe certainement au charme qu'elle dégage aujourd'hui…

On reste assez partagé à l'écoute de cet enregistrement mi-génial, mi-exaspérant. Znaider, en impeccable virtuose (les doubles et triples cordes sont, entre autres, d'une incroyable propreté) va chercher des couleurs fabuleuses, des pianissimi incomparables, renouvelle complètement notre écoute de certains passages et varie sans cesse la respiration. Et c'est là que le bât blesse. Car ce qui apparaît au départ comme une qualité ne tarde pas à anéantir la cohérence du discours. Le soliste privilégie l'instant au détriment de la vision globale de ces vastes mouvements et nous perd parfois dans des dédales de rubato ou d'effets inutiles. A trop chercher à se démarquer (de qui ?), le violoniste tombe des excès que l'on sent extrêmement contrôlés. Certes, Elgar lui-même, dont quelques enregistrements nous sont parvenus, prenait de considérables libertés avec ses propres indications mais cela semblait beaucoup plus naturel, moins «maniéré». En somme, si on admire çà et là les fulgurances de Znaider, il arrive qu'elles agacent au-delà du raisonnable.

Sir , à la tête d'une très fraîche (les vents sont extraordinaires), suit le soliste dans sa débordante imagination. Il ne fait pas oublier sa propre prestation, avec Hilary Hahn, dans un enregistrement dont la prise de son gonflait l'orchestre à outrance mais qui semblait mieux tenu que celui-ci (DG). Le chef rappelle également dans le livret qu'il a dirigé l'œuvre avec Yehudi Menuhin dont la vénérable gravure de 1932 (sous la baguette d'Elgar lui-même) reste le must.

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