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Grétry, so fashion !

Grétry devient décidément l'auteur à la mode. Après Zémire et Azor à Royaumont puis à Paris, l'Amant Jaloux à Versailles et à l'Opéra-Comique, La Fausse Magie à Reims, Metz et Rennes et surtout la résurrection d'Andromaque en concert au disque et sur scène rien que pour la saison dernière, on peut dire qu'il s'agit d'une véritable renaissance !

Voici donc venu le temps de Céphale et Procris, qui n'a pas eu les honneurs d'une re-création scénique au XXI° siècle, mais qui a été interprété en version de concert en novembre 2009 dans le cadre des «grandes journées Grétry» de Versailles, et enregistré dans la foulée en public, à la Salle Philharmonique de Liège. Ce «ballet héroïque», cependant bien plus chanté que dansé, consacrèrent les débuts du compositeur à l'Académie Royale de Musique, et fut créé à l'Opéra Royal de Versailles le 30 décembre 1773 à l'occasion du mariage du comte d'Artois, troisième des petits-fils de Louis XV. Ce dernier est resté plus célèbre pour les opéramaniaques sous le nom de Charles X, dont le sacre fut à l'origine de la création d'Il Viaggio a Reims de Rossini en 1825.

Grand théoricien de la musique par ses écrits, Grétry est un compositeur protéiforme, dont aucune œuvre ne ressemble à une autre. Il semble passer sans peine du plus pur opéra-comique de style troubadour à la bluette sucrée, de l'œuvre de circonstance, voire de complaisance, à la recherche la plus avancée. Avec ses récitatifs et ses morceaux fermés, ses références à la tragédie lyrique, ses réminiscences mozartiennes et ses accents gluckiens, sans parler d'un sujet mythologique et de la présence de personnages allégoriques, Céphale et Procris est considéré comme l'une des œuvres les plus conservatrices de l'auteur. Il faut cependant lire impérativement l'admirable texte d'accompagnement de pour comprendre la portée des recherches et des avancées de ce compositeur d'exception.

Avouons malgré toute notre admiration que l'orchestration de Grétry est assez ténue, et que l'ensemble , trop sage, ne parvient pas à y donner vie, contrairement à l'excellent Chœur de Chambre de Namur. Pierre-Yves Pruvot, toujours solide styliste, idéal dans les rôles de méchant, peine à convaincre en amoureux galant, principalement du fait d'un timbre pas particulièrement enchanteur et d'aigus douloureux. , bourrée de charme, est une irréprochable Procris. , qui se trouve décidément partout où l'on chante bien, a cependant tendance à sacrifier les consonnes à la beauté du son et à la sensualité du timbre, mais il est impossible de résister à son Aurore, aussi importante sur le plan dramatique que sa rivale.

Bref, Céphale et Procris n'a pas la portée d'Andromaque, malgré quelques scènes palpitantes, mais c'est une ravissante nouveauté qui mérite l'achat, et plusieurs écoutes prolongées, pour en découvrir tous les trésors.

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