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Créations françaises de Chostakovitch et Krzysztof Meyer

Bien connu comme biographe de Chostakovitch, le compositeur polonais (lire notre entretien) était au centre d'un double programme de musique de chambre, entouré de deux de ses maîtres, et , avec à la clef trois créations françaises. Dans le beau Théâtre Adyar d'inspiration Art Nouveau, moins connu mais aussi sonnant que la salle Cortot, les deux concerts ont permis d'entendre une succession d'interprètes qui sont autant d'ardents défenseurs du répertoire russe et d'Europe de l'Est, et qui ce soir jouèrent avec le supplément d'émotion causé par la présence de et d'Irina Chostakovitch.

En création française, la Sonate pour violon et piano de Chostakovitch date du 26 juin 1945. En cette seule journée, Chostakovitch composa 225 mesures. Il ne reprit jamais le fil de sa composition, peut-être pour des raisons liées à la forme elle-même de cette esquisse (Schnittke estimait que l'exposition de vaste dimension avec la confrontation de deux tonalités éloignées dépassait le genre de la musique de chambre), peut-être aussi pour des raisons expressives. En effet, alors qu'il était indispensable en cet été 1945 de célébrer le triomphe soviétique dans la Grande guerre patriotique, Chostakovitch composa deux thèmes dans une veine dramatique, déchirante même. Il ne les oubliera pas, puisqu'il les réutilisa dans sa Symphonie n°10, laquelle marquait la fin de l'ère stalinienne après la mort du tyran et signait le retour de Chostakovitch sur la scène musicale officielle. Marc Danel, accompagné de manière idoine par Muhiddin Dürrüoglu, y est d'une tension incandescente.

Autre temps fort de la soirée, la Sonate pour piano n°1 est une sorte de course échevelée à la Liszt revue par le constructivisme soviétique des années 20. Prise à bras le corps par un d'une humeur tellurique, voilà une œuvre à grand spectacle d'une revigorante impétuosité.

Avec en ouverture de soirée la création française de la Sonate pour violoncelle solo n°2 et en conclusion la Sonate pour violoncelle et piano n°2 dont il est dédicataire, porte l'essentiel du programme dévolu à . Immergé dans cette musique d'abord abrupte, il y révèle un compositeur intellectuellement rigoureux et qui ne craint pas les grandes formes.

C'est à cette aune d'exigence qu'il faut apprécier le caractère «aimable» et «donnant du plaisir aux musiciens», selon les termes du compositeur, des Duetti per due violoni. Les dix miniatures qui se succèdent constituent de beaux défis pour les violonistes. Marc Danel et Gilles Millet s'en sortent superbement.

Crédit photographique : Krzysztof Meyer © Krzysztof Meyer

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