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Eugène Onéguine, production polonaise à Valence

Cette production polonaise, présentée dans le cadre majestueux et intimidant du Palau de Les Arts de Valencia, œuvre de l'architecte Santiago Calatrava, était l'occasion pour le futur directeur musical de la maison de se confronter à un cheval de bataille du répertoire lyrique.

Né en 1981, le jeune chef israélien a été désigné, par l'intendante Helga Schmidt pour succéder à Lorin Maazel ! Choix risqué car remplacer une légende vivante de la baguette, qui plus est fondateur de l'orchestre, est un pari osé. Cependant, le jeune homme assure crânement et fait preuve d'une maîtrise assez sidérante pour son âge. Sa direction évite le clinquant et le distancé pour se concentrer sur le drame et rien que le drame. Il est largement aidé par un orchestre de Valence, qui ne possède peut-être pas les couleurs slaves, mais qui démontre une précision des pupitres et une homogénéité élogieuses.

Côté chant, la distribution alliait la beauté des voix à la vérité théâtrale. La soprano Irina Mataeva est l'émotion même en Tatiana, femme à la fois fragile, touchante mais décidée. Sans jamais forcer son chant, la jeune chanteuse atteint une perfection musicale totale. Il en va de même pour le baryton Artur Rucinski aux moyens vocaux impressionnants et à la large palette de nuances. Tous les autres chanteurs sont musicalement et stylistiquement soignés avec des dictions aussi exemplaires que parfaites. Comme à chaque production de cette maison, des jeunes artistes du Centre de perfectionnement Placído Domingo se mêlent, avec compétence, aux chanteurs.

Peu connu en Europe occidentale, le metteur en scène possède un solide métier qu'il a exercé à travers l'Europe centrale et orientale et aux Etats-Unis. Loin des relectures décapantes, son travail met l'accent sur la narration et les tensions du livret avec une direction d'acteurs à la fois précise et émouvante. Comme souvent avec lui, les décors et les costumes, de ses collaborateurs scéniques, très symboliques et stylisés, ont tendance a mécaniser la physionomie des personnages dans les scènes d'ensemble, comme si la pression sociale rendait impossible l'existence de personnalités déviantes. Ce travail à la fois sobre et musical s'avère rafraîchissant dans un contexte dramaturgique qui pousse trop souvent vers les excès.

Crédit photographique : © Tato Baeza

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