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Yuja Wang & les solistes du Berliner Philharmoniker

Sur trois concerts répartis en un week-end, des solistes du Philharmonique de Berlin et la pianiste chinoise nous offrent un panorama de grands quintettes. Il est assez rare de pouvoir entendre d'un seul coup autant de chefs-d'œuvre de musique de chambre en dehors des quatuors à cordes, et de plus dans des interprétations aussi talentueuses ; nous félicitons vivement l'organisateur de ce projet.

L'ensemble des concerts se caractérise par un grand dynamisme : les contrastes entre les mouvements rapides et lents (deux Brahms) ou entre les deux parties opposées dans un mouvement (2e mouvement de Dvořák, 3e mouvement de D. 956 de Schubert) sont mis en avant de manière convaincante. On note un formidable élan des musiciens en stretto dans une montée de crescendo pour aboutir à un point culminant, suscitant chez les auditeurs un vif enthousiasme. Dans le Quintette avec piano de Dvořák ainsi que le 4e mouvement du Quintette à cordes de Schubert, l'expression folklorique, brute et même rude, est très vivace dans une élégance mélodique. Les cordes sont parfois décalées, notamment sur des passages rapides, sans que nous ne sachions trop si c'était par ardeur naturelle ou par volonté de marquer le côté rustique de cette musique. Au dernier concert, le Quintette avec clarinette de Mozart est certainement le plus délicatement exécuté de toute la série. Notamment, la reprise du thème du 2e mouvement est jouée d'une telle façon qu'il est juste de dire qu'il s'agit là d'une véritable «musique du silence» : la musique est là, mais c'est en même temps un silence total. Dans le 4e mouvement de la même pièce, le passage du premier violon à la clarinette avant le tempo lent s'effectue avec un naturel absolu, sans que le changement d'instrument ne se fasse remarquer.

, qui accompagne trois des six quintettes, fait preuve d'un magnifique talent de chambriste. On a déjà largement commenté son immense virtuosité et son tempérament du feu, mais à l'âge de 24 ans, elle sait mettre tous ces atouts au service de la musique. Elle est l'une des rares pianistes capables de s'exprimer avec une multitude de nuances en forte ; son caractère enflammé se répand chez les autres musiciens, ce qui crée une expérience musicale inouïe, tant pour les interprètes que les auditeurs. C'est aussi une coloriste confirmée : on est étonné de voir à quel point elle sait adopter la couleur d'autres instruments – comment le timbre du piano fusionne avec celui des cordes au début de la coda du Quintette avec piano de Brahms ; on est également surpris de constater à quel point sa touche est douce et caressante, et en même temps grave, dans le 2e mouvement du même Brahms. C'est incontestablement l'une des meilleures pianistes de sa génération.

>Crédit photographique : © Fadil Berisha

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