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Musique russe à la centrale

Placé sous la direction artistique du pianiste , le festival de musique de chambre Spannungen [Tensions] se déroule chaque année à Heimbach, petite ville du district de Cologne. Les concerts y sont donnés dans un endroit plutôt inhabituel puisqu'il s'agit d'une centrale hydraulique (Wasserkraftwerk) dont, à en juger par le résultat discographique, l'acoustique est excellente pour ce genre d'activité. Existant depuis 1997, la manifestation a pris l'habitude d'immortaliser quelques concerts au disque, d'abord chez EMI (jusqu'en 2004) puis chez AVI.

Enregistré live par des musiciens aux affinités certaines mais uniquement réunis pour l'occasion, on pouvait craindre –comme c'est parfois le cas avec ce genre de parution- que le produit s'apparente plus à la carte postale de vacances destinée à un certain public restreint qu'à un véritable projet artistique. On est vite rassuré par la prestation du quatuor interprétant l'œuvre de Tchaïkovski (Tetzlaff, Weithaas, Masurenko, Rivinius). Si les basses manquent parfois de netteté ou que l'alto se fait trop discret (développement du premier mouvement), la sonorité est chaude et relativement onctueuse, l'intelligence narrative plutôt convaincante, le relief ne manque pas (Allegretto vivo e scherzando) et le climat tragique de la marche funèbre qui sert de mouvement lent habilement installé (les sections extrêmes sont particulièrement bien construites). En somme, bien que l'ensemble ne soit pas constitué de manière permanente, ces quatre-là sont assurément sur la même longueur d'onde chambriste.

Dans le Trio n°2 de , , Christian et exploitent toute la raucité des dissonances de cette géniale partition. Malgré quelques imprécisions des instrumentistes à cordes, on apprécie la manière dont les musiciens en mettent les contrastes en valeur. Ils trouvent l'expression juste dans le grotesque Allegro ma non troppo et nous laissent idéalement ressentir l'oppression insupportable dont le compositeur était victime en Union Soviétique (Allegretto). Le plus beau moment de l'œuvre est certainement le Largo, passacaille sur un ostinato de piano qui se termine aux confins du silence. Plus qu'un simple « disque souvenir », cet enregistrement possède donc une intéressante valeur musicale.

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