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Bâle : Carmen par Calixto Bieito

Tout le monde a déjà vu la Carmen montée par , créée en Espagne en 1999, promenée depuis dans toute l'Europe – hors la France, inexplicablement hostile – et éditée en DVD.

Tout le monde, sauf l'auteur de ces lignes, qui l'aura découverte douze ans après sa création, à l'occasion de cette reprise montée par le metteur en scène lui-même pour l'une des maisons d'opéra les plus ouvertes à son talent. Il est toujours délicat de découvrir une production dans ces conditions, surtout quand alternent pour chaque rôle deux ou trois chanteurs qui n'ont sans doute pas également travaillé avec Bieito. Contrairement aux productions créées par Bieito directement à Bâle, celle-ci laisse pour le moins perplexe. Sans doute n'y a-t-il rien ici qui n'ait pas sa pertinence, mais on peine à se satisfaire des signes trop timides qui distinguent ce qu'on voit dans une production de routine, et on est surpris à la fois des limites du jeu d'acteur des interprètes et du manque de maîtrise technique qui affaiblit les enchaînements scéniques. L'art de la mise en scène est certainement celui qui supporte le moins que vingt fois sur le métier on remette son ouvrage.

L'interprétation musicale ne permet qu'en partie d'oublier cette déconvenue. Le point noir de la distribution est l'Escamillo éraillé d'Eung Kwang Lee, qui ne parvient pas même à sauver une minimale justesse ou un tant soit peu de diction française – la production recourt face aux difficultés linguistique des chanteurs à cette déplorable facilité que constitue la quasi-suppression des dialogues, jusqu'à l'absurde. n'est pas épargné : être un excellent Peintre dans Lulu de Berg ne lui confère pas vraiment toute la séduction requise dans ce rôle, et il faut du temps pour que les qualités musicales sous-jacentes fasse oublier l'aigreur du timbre et le manque de souplesse de la voix ; la jeune interprète de Micaëla, membre du studio lyrique du Théâtre de Bâle, a du moins l'avenir devant elle pour améliorer sa diction et affiner ses effets.

Heureusement, le bilan de la soirée est allégé par une véritable révélation, , qui sait n'utiliser sa voix remarquablement ductile et ses graves généreux qu'à bon escient, sans trace de vulgarité ou d'emphase. Elle bénéficie comme ses collègues d'une direction efficace, manquant un peu de subtilité mais attentive aux chanteurs, mais elle sait bien mieux en tirer parti.

Crédit photographique : © Hans-Jörg Michel

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