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Telemann par Fabio Biondi, entre musique pure et rhétorique

Ce nouvel enregistrement de l'ensemble dirigé par se propose de montrer les multiples facettes de l'art de , entre musiques « pure » et descriptive, à cheval entre plusieurs « goûts ». On sentira le musicien plus proche du style italien que d'aucun autre, bien que les deux suites qui figurent au programme s'ouvrent toutes deux par des ouvertures à la française en règle.

Des trois concertos proposés, celui pour alto est le plus original, puisqu'il reprend le plan en quatre mouvements des sonates d'église de Corelli plutôt que celui en trois mouvements des concertos de Vivaldi. Un peu noyé dans le « Largo » initial, le timbre si particulier de l'alto se révèle dans les mouvements suivants, et en particulier dans le très introspectif « Andante ». Le jeu de Stefano Marcocchi est d'une grande finesse, allant chercher les accents mélancoliques dans les nuances les plus douces de son instrument, cependant qu'il fait montre d'une virtuosité très maitrisée dans le « Presto » final.

Les deux autres concertos, pour deux et trois violons, sont plus ludiques autant que moins surprenants. Aimables dans l'expression, ils sont composés de manière moins fine, par juxtaposition de séquences. Agréables, donc, sans plus.

Notre coup de coeur va à la suite « Burlesque de Quixotte », qui illustre quelques moments de l'oeuvre de Cervantès en six tableaux contrastés et heureusement « trouvés ». Après une ouverture assez convenue quoique quelque peu piquante dans sa seconde partie, « La reveille de Quixotte » est une petite merveille qu'on ne se lasse pas d'écouter, de même que « Ses soupirs amoureux … », dramatiquement entrecoupés de silences, qui peignent l'hésitation, l'attente devant l'objet amoureux. « Sanche Panche … » est l'occasion pour Telemann d'employer un lieu commun, le cri de l'âne rendu par de grands sauts d'intervalles aux violons – Saint-Saens ne trouvera pas mieux dans le Carnaval des animaux. Interprétée avec finesse, cette suite est un grand moment rhétorique, où la musique se fait langue à part entière.

La suite « La Changeante » enfin tire son originalité des fréquents changements de tons et d'éthos d'un mouvement à l'autre. Le discours alterne donc entre vivacité et langueur, dans un ensemble assez collé-monté pas désagréable au demeurant.

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