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Philip Glass, voyage dans l’enfer kafkaïen

En janvier 2009, nos lignes relataient le spectacle Dans
la colonie pénitentiaire
 , un opéra de chambre du compositeur américain que l'Opéra de Lyon avait monté dans le cadre de son festival d'opéra dont le thème se référait aux « Héros perdus ».

Dans le cas de cet opéra de , le héros condamné par la société doit mourir selon une procédure précise. Un visiteur assiste à l'exécution afin de s'assurer que les procédures de l'exécution sont parfaitement observées. Un sujet terrifiant que la mise en scène lyonnaise avait rendu en créant une tension scénique quasiment insoutenable.

L'enregistrement de cet opéra permet aujourd'hui de toucher brièvement à la musique de . Une visite que la durée limitée de l'ouvrage en fait un parfait exemple d'initiation à la musique du compositeur américain et à la musique classique contemporaine. Fidèle à son style, Philip Glass favorise la répétition des motifs musicaux. Dès les premiers accents, le quintette à cordes qui soutient le chant semble inscrit dans une certaine légèreté musicale. Alors qu'on pourrait penser l'écriture musicale légère inadaptée à l'enjeu dramatique de l'intrigue, le choix de cette composition met en relief l'indifférence de l'administration devant l'horreur du geste assassin par rapport à l'importance du respect des instructions rédigées.

L'enregistrement d'une qualité sonore parfaite révèle une admirable fusion entre les voix et le quintette à cordes orchestrant l'œuvre de Philip Glass. La dynamique orchestrale exaspérante, lancinante, crée un climat dramatique bientôt difficilement supportable. Tout respire le drame. Le baryton acre d'Omar Ebrahim souligne la dureté de l'officier, exécuteur zélé de l'exécution du condamné dont l'unique préoccupation se limite à ce que la machine infernale soit parfaitement au point. Contrastant avec cette froide analyse de l'engin, la voix douce de ténor de semble apporter un répit au crime qui se prépare.

Etrange impression que procure l'écoute de cette œuvre. Une attention un peu soutenue à cette musique vous plonge soudain dans l'intrigue. Les sons de Philip Glass submergent, et même sans comprendre les paroles (pourtant chantées avec une diction remarquable), on se sent envahi par le drame. Admirable, subversif et terrifiant.

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