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Les Pièces de fantaisies de Vierne par Pierre Labric

Après les six symphonies et les Pièces en style libre, voici le troisième et dernier volume consacré aux œuvres d'orgue de par . Enregistrées voici exactement quarante ans sur le Cavaillé-Coll magique de Saint-Ouen de Rouen, ces pièces de fantaisie n'ont pas pris une ride. Captées dans un univers sonore idéal, rappelant grandement par l'acoustique et la couleur de l'orgue, celui de Notre-Dame de Paris où l'auteur fut organiste, manie avec volupté cette musique qui reste l'un des sommets de . Bien qu'ancienne, la prise de son analogique rend justice au vieil orgue, et le transfert en CDs, préserve la quintessence de cet enregistrement.

L'approche de est dans la droite ligne de celle de Jeanne Demessieux qui fut son professeur. Elle s'inscrit dans ce que l'on nomme habituellement la tradition, teintée toutefois d'une pointe de néo-classicisme. Cela s'entend dans certaines registrations riches en plein-jeux, avec celui du positif de dos de Saint-Ouen, témoin d'une époque où l'orgue n'était rien sans ce mélange omniprésent. Les Pièces de fantaisie, groupées en quatre suites, comprenant chacune six pièces aux titres évocateurs offrent une diversité de climats étonnante et idéale pour tout entendre des génies de Vierne  et de Cavaillé-Coll réunis. Quelle rencontre au sommet, à laquelle s'associe grandement Pierre Labric. Certaines ambiances sont extraordinaires : il faut écouter par exemple Etoile du soir, au centre de la troisième suite. Cela commence comme du Frescobaldi, on croirait une toccata sur l'élévation, qui peut à peu se développe dans ce langage propre à Vierne, chromatique et torturé à souhait, pour aboutir au retour du thème sur un lit de jeux ondulants au clavier de récit : un grand moment de discographie. On comprend Widor qui évoquait Michel-Ange en parlant de cet orgue. Par ailleurs on pourra s'éblouir avec la Marche nuptiale, la Toccata ou le célèbre Carillon de Westminster, où là aussi, le retour au thème donne le frisson, cet instant précis où on l'attend, et où enfin il se pose. D'autres pièces encore évoquent Notre-Dame de Paris de manière plus fantasmagorique, avec Gargouilles et chimères ou Fantômes. Dans la quatrième suite, Cathédrales, à elle seule résume à la fois l'art de Vierne et cette ambiance si particulière de ces lieux mystiques.

Pierre Labric se montre conquérant, poète, et virtuose : son inspiration est totale et sa vision fait référence. On ne saurait trop recommander l'écoute de ces chefs d'œuvre de la musique impressionniste du XXe siècle, dans un tel contexte. Encore un grand merci à l'éditeur pour son courage et ses choix, judicieux en la matière.

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