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Honegger à hauteur d’homme

« Sans doute la plus difficile d'exécution et de compréhension de ses cinq sœurs, elle est écrite dans un langage plus heurté et moins dépouillé que les suivantes ». Voilà ce que notait Harry Halbreich (Fayard) à propos de la Symphonie n°1 d', chef-d'œuvre aussi poignant que négligé dont le premier mouvement, fait de « l'enchevêtrement d'une demi-douzaine de thèmes », est le plus atonal qu'ait écrit le compositeur. Finement inspiré, trouve ici les ressources nécessaires pour conférer l'élan féroce essentiel à l'Allegro marcato initial et au Presto du mouvement final tout en parvenant à hiérarchiser parfaitement la polyphonie et rendre la partition parfaitement lisible. Le est un excellent instrument – et éditeur, en l'occurrence – apte à suivre son chef dans le rendu de son intéressante « analyse » qui vulgarise l'œuvre dans le meilleur sens du terme.

La Symphonie n°3 dépeint le monde ravagé après la guerre – des « lendemains qui font mal » (Halbreich), malgré la victoire. Mieux servie en nombre d'enregistrements, la discographie de l'œuvre reste dominée la version « grand angle » et puissamment dramatique de Karajan (DGG) malgré les excellents Mravinsky (Melodiya), Cluytens (Arts) ou Ansermet (Orfeo). Dans cette « Liturgique », Davies ne démérite pas, sans pour autant tout emporter sur son passage. Honegger voulait que les « thèmes violents [du Dies irae] se succèdent sans laisser à l'auditeur un instant de répit. Pas moyen de souffler, de réfléchir. L'ouragan emporte tout, balaye tout, aveugle, coléreux » (à Bernard Gavoty). En l'occurrence, le chef fait surtout en sorte que la rencontre de la verticalité et de l'horizontalité de l'écriture provoque d'impressionnants coups de tonnerre sans que l'ensemble ne prenne forcément une dimension universelle. Le résultat est d'excellente tenue et la manière dont, tout au long de la symphonie, Davies parvient à instaurer les climats adéquats, montre toutes les affinités qu'il possède avec la musique d'Honegger. Espérons qu'il continue son exploration du cycle avec, si possible, autant de pertinence.

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