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Metz : Sophie Koch, wagnérienne d’élection

Les quinze premières années de sa carrière furent surtout consacrées à Mozart (Chérubin, Dorabella…), Rossini (Rosina, Cenerentola…) et aux rôles dits mozartiens de : Octavian du Rosenkavalier, le compositeur d'Ariadne auf Naxos

Pendant toute cette période, notre grande mezzo nationale a su domestiquer et plier sa voix à des emplois nécessitant avant tout la souplesse de la ligne et des phrasés, voire la virtuosité de la vocalise. Cette technique parfaitement accomplie, qui a permis à de sillonner toutes les grandes scènes de la planète dans ces emplois relativement légers, lui permet désormais d'aborder les rôles plus lourds auxquels son instrument, un mezzo dont la puissance et la longueur semble illimitées, la prédisposait. Les prises de rôle récentes et à venir (Fricka en Allemagne, Brangäne à Covent Garden en 2009, Vénus de Tannhäuser à Paris l'année dernière, Adriano de Rienzi bientôt à Salzburg, Kundry dans un avenir qu'on espère proche) confirment les affinités de , ainsi que l'adéquation de sa voix, avec l'univers wagnérien. Le concert messin donné dans la grande salle de l'Arsenal aura ainsi permis au public de découvrir l'interprète dans son nouveau répertoire.

Les Wesendonck Lieder, donnés en première partie de concert, surprennent par l'ampleur et le volume de la voix. Si les subtils phrasés, souvent couronnés d'ineffables demi-teintes, font valoir une étonnante longueur de souffle, quelques aspérités dans le chant brisent encore ici et là, notamment dans « Der Engel », la tenue de la ligne. Mais quelle passion dans ce « Schmerzen », quelle intensité dans « Im Treibhaus », que de poésie dans ce « Traüme » qui laisse présager la captivante Isolde que pourrait peut-être, un jour, devenir… Tiendrions-nous enfin, la seule depuis Germaine Lubin, et après les espoirs déçus de Régine Crespin et de Nadine Denize, notre grande Isolde française ?

La grande scène d'Adriano « Gerechter Gott », extraite de troisième acte de Rienzi, fait valoir des aigus triomphants, une ligne vocale enfin parfaitement domptée et surtout un tempérament de braise et de feu. Triomphe assuré ! En début de deuxième partie, la fin du prologue d'Ariadne auf Naxos (curieux choix pour un programme essentiellement consacré à Berlioz et à Wagner…) aura permis au public de retrouver Sophie Koch dans un de ses emplois de prédilection, et de vibrer au rythme des émotions du jeune compositeur de l'ouvrage.

Dans un programme contenant nombre de pièces brillantes et virtuoses, l' a su davantage convaincre dans l'intériorité contenue des Wesendonck Lieder que dans l'emphase et la pompe de l'ouverture de Rienzi. , à la tête de son orchestre, a par ailleurs confirmé son affinité avec la musique orchestrale de Berlioz, dont il sait mieux que personne doser les savantes subtilités. L'ouverture de Béatrice et Bénédict, avec ses couleurs orchestrales chatoyantes, aura cependant davantage remporté l'adhésion que les rythmes des trois extraits de La Damnation, donnés en début de programme.

Mais avouons que ce soir-là le public s'est davantage passionné pour la soliste et pour les fascinantes incarnations wagnériennes à venir.

Crédit photographique : Sophie Koch © Patrick Nin

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