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Tabea Zimmermann/Kirill Gerstein, pour rendre à César…

Lors de la parution du premier disque du duo /, nous regrettions l'absence au programme de la sonate sœur de l'op.120/2, dont nous appréciions la très belle interprétation. Les musiciens nous la proposent ici aux côtés, cette fois, de pages célèbres (Schubert et Franck). Plaçant cette nouvelle collaboration dans la continuité du précédent album, les interprètes y font preuve des mêmes qualités – et relative nonchalance. Toujours sur la même longueur d'ondes (écoutez l'Allegro grazioso !), Zimmermann et Gerstein accordent toute leur attention aux détails, font preuve d'une musicalité exquise et sont, çà et là, sublimes de tendresse (Andante un poco Adagio). Dommage qu'il faille attendre le développement du premier mouvement pour que l'Allegro soit enfin abordé appassionato

Même « relâchement » dans l'Arpeggione de Schubert qui, sans démériter, aurait gagné en accroche si Gerstein s'était montré un rien plus imaginatif (il faut attendre certains traits de l'Allegretto final pour l'entendre prendre les initiatives les plus payantes). Pour autant, on se laisse facilement séduire par la souplesse de Zimmermann dont l'instrument moderne (construit par Etienne Vatelot en 1980) sonne toujours avec autant de chaleur et de sensualité.

Il faut cependant attendre la Sonate de Franck pour se sentir complètement transporté par ce récital. Avec près de 200 enregistrements au compteur (toutes transcriptions confondues), l'œuvre a été mieux que bien servie par les grands archets de l'histoire du disque sans pour autant jamais sonner ainsi. Seuls quelques passages étant transposés, on se laisse enivrer par les aigus de l'alto de l'Allemande dès les premières notes de l'Allegretto ben moderato – tout ce qui est joué à la même hauteur absolue que la version originelle pour violon est ici pris dans des positions élevées qui réduisent mais intensifient les vibrations des cordes. La suprême maîtrise technique et la généreuse musicalité de Zimmermann font le reste. Entre maturité artistique et jeunesse intellectuelle, cette version travaillée conserve de bout en bout une fraîcheur qui lui sied à merveille. Rarement transcription l'emporte sur l'original. C'est le cas le temps de cette interprétation étourdissante.

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