DGG, Esa-Pekka Salonen et l'Orchestre philharmonique de Radio-France offrent à Henri Dutilleux un beau cadeau d'anniversaire pour ses 97 ans : un disque monographique comportant, en première mondiale, le cycle Correspondances. Longtemps repoussé du fait des indispositions vocales de sa créatrice Dawn Upshaw, ce premier enregistrement est confié à la soprano Barbara Hannigan, connue pour repousser toutes les limites vocales. On reconnait dans ce cycle, toute la palette émotionnelle et le sens de l'orchestration d'Henri Dutilleux. La voix s'immisce et fusionne avec un matériau orchestral qui suggère une variété infinie de couleurs. L'interprétation d'Esa-Pekka Salonen, en technicolor, fait briller un Philharmonique de Radio-France galvanisé par l'enjeu.
On remonte la chronologie créatrice du compositeur avec le concerto pour violoncelle Tout un monde lointain. Salonen retrouve ainsi son vieux compère Anssi Karttunen. Cette vision est placée sous le signe de la concentration granitique et de la précision. Techniquement irréprochable, cette lecture pêche par un manque de respiration et d'ampleur dans le traitement du matériau orchestral. La poésie se fait plus urbaine que foncièrement littéraire. On continuera de se référer au disque de Marc Coppey avec l'Orchestre philharmonique Royal de Liège (Aeon).
Salonen est plus à affaire dans les Shadows of Time dont il retient cisèle la pureté instrumentale et les alliages de timbres. L'Orchestre philharmonique de Radio-France, rompu à toutes les musiques contemporaines, livre une prestation exemplaire, qui risque d'être difficilement égalable.
Pour les Correspondances, ce disque est de toute façon indispensable.