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L’hommage de Profil Hänssler à Wolfgang Sawallisch

Décédé en février dernier à l'âge de 89 ans, après une carrière bien remplie à la baguette mais aussi au clavier comme chambriste et accompagnateur, était peut-être un des derniers représentants des Kapellemeister germaniques, ces solides professionnels qui apprirent patiemment leur métier pour l'exercer ensuite de longues années pour les plus chanceux d'entre eux. C'est ainsi, qu'après des débuts en 1947 comme répétiteur à l'opéra puis comme chef principal à Ausburg, il devint progressivement un des plus éminents et reconnus chefs allemands, sans toutefois atteindre les sommets de renommée des superstars de la baguette d'alors, question d'aura et de charisme auprès du grand public sans doute et peut-être aussi d'un style très sobre, clair, proche de la lettre de la partition sans donner le sentiment de toujours transcender les notes.

Profil Hänssler a choisi des enregistrements effectués avec l'orchestre de la Radio Bavaroise, également disponibles séparément, complété par un disque où le chef se mue en pianiste pour le Quintette « La truite » et le joli Trio Notturno de Schubert. Ces enregistrements sont-ils idéalement choisis parmi les plus représentatifs du chef ? Oui et non. Oui pour les compositeurs sélectionnés, les classiques Mozart, Haydn, Schubert, Mendelssohn, qui avec Schumann, absent ici, constituaient sans doute le cœur de son répertoire hors opéra, en tous cas celui qu'il réussissait le mieux, et Orff pour une « certaine vision » de la modernité d'alors. On sera plus réservé sur la réussite de ces différents enregistrements, assez variable il faut bien le reconnaitre.

On pourra être surpris en passant du disque Mozart au disque Haydn, pourtant enregistrés à seulement quatre ans d'écart, de la différence de style au point qu'on pourrait se demander s'il s'agit bien du même chef. Car après des Mozart alertes, vifs, nerveux et pétaradants qui ne dépareraient pas dans les canons à la mode aujourd'hui, voilà des Saisons de Haydn incroyablement pesantes, totalement dénuée de variété de climats (au pluriel, on traverse les quatre saisons tout de même) au profit d'un uniforme dramatisme parfois terrifiant totalement hors de propos. A des années lumière de la superbe version de René Jacobs, mais ce n'est pas qu'une question de style « à la romantique » versus « à la baroque » car dans ce style classique d'autres chefs y ont fait beaucoup mieux (Karajan, Bernstein, Böhm).

Heureusement on remonte sérieusement la pente avec un enregistrement live de l'oratorio Elias de Mendelssohn, qui vient compléter l'enregistrement de studio fait avec le Gewandhaus de Leipzig pour Phillips en 1968, référence incontournable depuis. Si le nouveau venu, capté en 2001 ne renvoie pas l'aînée aux oubliettes, il s'en approche et monte le chef à son meilleur. (Voir ici la critique de l'édition isolée datant de 2011). L' Antigonae  de est plus difficile à classer, car l'œuvre elle-même est d'une austérité presque rébarbative, mais l'interprétation semble lui donner le maximum, en particulier avec une absolument saisissante qui capture instantanément l'auditeur. (Pour plus de détail, on renverra le lecteur sur la critique de l'édition isolée parue en 2010, en ajoutant que pas plus qu'alors, le mélomane non germanophone ne trouvera dans ce coffret grain à moudre pour l'aider à comprendre le qui, quoi, dont, où de cette Antigonae).

Enfin, bonne idée pour un chef qui a toujours, et avec grand succès, osé se mettre au clavier pour de la musique de chambre et pour accompagner des récitals vocaux, que d'avoir inclus dans ce coffret un disque entier consacré à la musique de chambre. Si les deux Schubert proposés ici se défendent fort bien, il faut les prendre plus comme un hommage justifié à l'art complet du musicien tout aussi complet qu'était , sans y trouver ici de quoi chambouler la discographie de ces deux pièces.

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