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Soirée de solistes avec Nathalie Stutzmann et François Leleux

Avec Bach, Haydn et Mozart, l' avait convié les trois piliers de l'histoire de la musique pré beethovénienne pour un programme où le dialogue entre solistes, instrumentistes ou vocal, dominait, avant de se conclure avec la glorieuse Symphonie Jupiter de Mozart.

Connu comme un des meilleurs hautboïstes du moment, soliste du Chamber Orchestra of Europe après avoir été celui de l'Opéra de Paris ou du Bayerischen Rundfunks, n'hésite pas à diriger à la baguette ou depuis son hautbois, comme nous avons eu l'occasion de le constater ce soir à la tête de l' dont il est artiste associé depuis 2012. Bien qu'écrite pour deux hautbois, un basson, cordes et basse continue, ce n'est pas moins de trois hautboïstes que nous vîmes entrer en scène pour cette Suite pour orchestre n°1 de Bach, les deux instrumentistes habituels de l'orchestre, Daniel Arrignon et Michel Giboureau venant s'assoir au premier rang au centre, accompagnés par le chef-soliste qui resta debout pour diriger l'ensemble. Trois hautbois pour deux lignes écrites par Bach, c'est un de trop, sureffectif mis à profit pour partager la première ligne entre et Daniel Arrignon, qui s'échangèrent ainsi les phrases musicales, libérant par instant le premier de son rôle de soliste pour celui de chef. Cela n'empêcha pas l'exécution de ce soir de trop ressembler à un concerto pour hautbois, voire un Brandebourgeois qui s'ignore, plutôt qu'à une suite normalement plus équilibrée (si on excepte la seconde suite et sa flûte solo), d'autant que le basson nous parut trop discret dans son dialogue avec ses partenaires, et que les cordes, manquant de mordant et d'ampleur, étaient bien peu directives.

Les cinq airs pour voix d'alto qui suivirent nous donnèrent la même impression, celle d'une interprétation qui valait avant tout pour sa partie soliste. Cette fois c'est qui s'en chargea sans hésiter, sa voix dense et charnelle occupant immédiatement l'espace sans avoir besoin d'échauffement. La ligne vocale élégante et pure, sans sophistication inutile mais constamment expressive, servit idéalement le texte. Quatre extraits de cantates d'abord pour finir par ce qui est un des moments simplement sublimes de l'histoire de la musique avec le Erbarme dich de la Passion selon Saint-Mathieu. On n'y a pas vraiment atteint ce niveau ce soir, il aurait fallu plus de présence de la part de l'orchestre, dont la pulsation si importante ici était bien discrète, pour alors porter sa soliste plutôt que simplement l'accompagner.

Nous ne pouvons qu'être d'accord avec Gilles Cantagrel, auteur de la notice de ce concert, à propos du Concerto pour hautbois : peu importe si Haydn en était bien l'auteur, ou si c'était l'élève Beethoven, car on y prend un évident plaisir d'autant qu'enfin ce soir, toutes les conditions du succès étaient réunies avec un orchestre franc, mordant, dynamique, enjoué, fruité, capable de donner la réplique au hautbois pétillant de . Tout fonctionnait à merveille dans ce qui constitua nettement le meilleur moment de la soirée, salué avec une franche spontanéité par un public conquis. Mais on redescendit d'un cran dans la Jupiter conclusive qui ne méritait pas son nom, car en déficit de tension, d'énergie, de contrastes, et au final de puissance expressive. Attaqué systématiquement trop en douceur, sinon franchement mollement, chacun des mouvements avait du mal à se développer, et finalement parut trop long, même l'Andante cantabile, pourtant rapide de tempo, trop d'ailleurs. L'usage systématique des reprises n'arrangea rien. L'extraordinaire finale ne le fut donc point, achevant la soirée sur un bogey comme disent les golfeurs alors qu'on avait applaudit un superbe birdie juste avant.

Crédits photographiques : François Leleux © Jean-Baptiste Millot –  © Simon Fowler

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