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Festival Pianoscope de Beauvais : nouveau départ avec Boris Berezovsky

Cette année marque un grand changement du festival Pianoscope de Beauvais. Si l'édition 2012 avait été entièrement préparée par Brigitte Engerer, fondatrice du Festival, il a connu cette année un véritable démarrage avec le nouveau directeur artistique, .

Pour cela, la direction du festival a souhaité une ouverture introduisant des éléments de musique traditionnelle. On a ainsi pu entendre les chanteurs de l'Eglise de Saint-Panteleimon de Géorgie (18 octobre) et l'Ensemble traditionnel roumain Leonard Iordache (20 octobre). Il y avait également du jazz, avec et Bojan Z (17 octobre). Le tout dans une atmosphère conviviale et amicale, qui règne entre les musiciens eux-mêmes (car ce sont avant tout des amis de longue date de Berezovski et d'Engerer) mais aussi entre les musiciens et le public.

Le samedi 20, le marathon commence à 12h30, à l'Auditorium Rostropovitch, avec un récital de qui conjugue Bach et Chostakovitch. Sur le thème du prélude et de la fugue et à travers une interprétation dynamique, il montre une étonnante similitude entre les deux compositeurs à plus de 200 ans d'écart.

A 14h30, au même endroit, un bouquet de musique postromantique est proposé par Ellina Pak (alto) et Anastasia Safanova (piano) (Sonate de Hindemith, Preludium et Allegro de Kreisler et Sonate pour violoncelle et piano de Rachmaninov dans la transcription pour alto). Ensuite, il était prévu que Berezovski joue cinq morceaux de différents compositeurs transcrits par Rachmaninov, mais comme la partition est introuvable, il les remplace par cinq Préludes du même compositeur ! Il offre en bis deux des pièces initialement prévues (après avoir retrouvé la partition). Un bon exemple de la « liberté » voulue par la direction du Festival, très bien accueilli par le public.

Samedi à 16h15, à la Maladrerie Saint-Lazare, deux jeunes pianistes russes interprètent de la musique… russe. exécute Medtner (Trois pièces à la mémoire d'Alexis Stanchinsky), Prokofiev et Pabst, et Alexei Petrov, Medtner (3 Contes de fée), Scriabine, Rachmaninov et Prokofiev. Talentueux et virtuoses, ils ont chacun un lyrisme et un dynamisme qui leur sont propres : Si Turpanov est doué pour les passages poétiques, Petrov a en général de l'ampleur dans son jeu.

A 18h30 toujours à la Maladrerie, d'abord quelques œuvres pour piano solo par (deux Images du Livre I et dix Préludes du livre I de Debussy, fluides, claires et très extériorisés) ; puis, (violon) et (violoncelle) le rejoignent pour le très rare Trio en fa majeur de Saint-Saëns. Les trois musiciens mettent magnifiquement en valeur la simplicité transparente et l'équilibre mozartien qui prédominent dans cette œuvre de jeunesse, dans une atmosphère de gaîté juvénile.

A 20h30 au Théâtre du Beauvaisis, donne un récital Debussy-Liszt-Chopin. Suite aux trois Images du Livre II, les trois Préludes qu'il a choisis (Les collines d'Anacapri, La fille aux cheveux de lin et Minstrels) ont été joués par Berezovsky quelques heures auparavant et la différence de style entre les deux pianistes saute aux oreilles. Muraro s'attache plus aux couleurs à chaque moment de la partition, pour souligner différentes atmosphères. Après les deux transcriptions d'opéras de Wagner par Liszt (« Chœur des fileurs » du Vaisseau fantôme et « Isolde's Liebestod » de Tristan et Isolde) et l'entracte, il interprète sans interruption quatre pièces de Chopin (Fantaisie, Barcarole, Berceuse et Tarentelle), exigeant une grande concentration à l'auditeur.

Le dimanche 20 à 11h à la Maladrerie, c'est le traditionnel concert gratuit de jeunes pianistes. , qu'on a déjà entendu la veille, joue Schnittke et Brahms avec parfois des sonorités agressives et crues ainsi que des détails bruts ; suit dans Kreisleriana presque philosophique, avec une notion du temps intériorisée et teintée de nostalgie. Sa sonorité est en général douce et ronde, mais il fait montre d'une grande maîtrise dans l'expression de coloris, comme par exemple cet extraordinaire contraste entre les 6e et 7e morceaux. L'un des derniers élèves de Brigitte Engerer et 2e prix du dernier Concours Reine Elisabeth (2013) se démarque ainsi par sa maturité et sa profondeur.

A 16h, dans la même salle, interprète Schubert, Szymanowsky et Alkan. Virtuosité sans faille, phrasées claires, maîtrise du son et des nuances, distribution de force physique parfaitement contrôlée, toutes ces qualités se retrouvent notamment dans le Concerto pour piano seul (extrait des Douze Etudes dans tous les tons mineurs op. 39) d'Alkan. Découvrir ce compositeur encore peu connu dans une interprétation aussi aboutie nous procure un immense plaisir.
A 18h au Théâtre, arrive enfin le grand moment du Festival, le concert de clôture avec la partie surprise. La soirée, roumaine et orientale, est divisée en trois parties : la musique de chambre en première partie (Rondo alla zingarese de Brahms, Trio pour flûte, violoncelle et piano de Martinu avec Juliette Hurel, quelques morceaux de Bartók dont Six Danses populaires roumaines) ; l'Ensemble traditionnel roumain Leonard Iordache en deuxième partie (où joue admirablement un air tzigane avec l'Ensemble !) et la partie surprise à la fin. Dans ce dernier concert, outre les artistes précédemment cités, Jean-Marc Phillips-Varjabedian (violon) et (piano) rejoignent sur scène, tantôt seul(e), tantôt à plusieurs, pour le plaisir de jouer et de partager de belles musiques avec tous. Parmi les œuvres proposées, Syrinx et Valse romantique de Debussy, Czardas obstinée de Liszt, Liebeslied de Kreisler arrangé par Liszt, une improvisation sur le précédent et une autre improvisation par Petrov, extraits de L'Heure espagnole de Ravel, la transcription acrobatique pour piano de Schultz-Evler du Beau Danube bleu de Strauss fils, Mélodie de Tchaïkovsky… avant que les musiciens s'amusent et dansent en coulisses sur les rythmes endiablés de l'Ensemble Iordache.

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