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A Londres Berlioz et le LSO continuent l’idylle

Si on devait déterminer quel orchestre partage avec la musique de Berlioz  l'intimité la plus profonde, le pourrait légitimement prétendre à ce titre.

Forte d'un travail de plusieurs décennies avec Sir Colin Davis, la phalange londonienne a montré dimanche 3 novembre, lors de son interprétation de La Damnation de Faust, qu'elle n'avait pas perdu la main. Le concert faisait partie de la série d'automne « Gergiev's Berlioz » entamée le 31 octobre dernier au Barbican, avec à l'affiche «quelques unes des œuvres les plus puissantes et révolutionnaires » du célèbre compositeur romantique français.

L'actuel chef principal du LSO, , s'est ainsi inscrit dans la continuité de l'œuvre de son prédécesseur tout en apportant sa touche personnelle : direction énergique, tempi soutenus, mise en valeur du talent mélodique de Berlioz.

L'orchestre et son chef n'ont pas manqué la dose de second degré de certaines des pièces maîtresses de la Damnation de Faust, telles que la Marche hongroise et  la Fugue académique, au moyen de ralentis appuyés et de contrastes frôlant le grotesque : la grande flexibilité de l'orchestre, passant du comique au poignant en un clin d'œil, parvint à rendre à merveille les sentiments éparses et contradictoires de cette musique. La Damnation de Faust, un opéra sans mise en scène ? Le LSO a parfaitement compris que son rôle est de donner corps à un espace imaginaire regorgeant de couleurs aussi bien harmoniques  qu'orchestrales.

Si la performance de l'orchestre est indéniablement remarquable,  celle des chanteurs — chœur et solistes — est plus inégale. Le minimalisme du jeu de (Faust), parfaitement adapté à cette œuvre à mi-chemin entre opéra et oratorio, s'accompagnait malheureusement d'un chant dans la surenchère perpétuelle et le lyrisme exacerbé, qui auraient sans doute mieux convenu à un air de bel canto italien ; l'articulation, à force d'être parfaitement claire, en devenait martelée et exagérée. A ses côtés, le Méphistophélès carnassier et caressant de manquait de puissance et de sarcasme. Le plus regrettable fut sans conteste la diction du choeur, qui souffrait d'une absence de netteté dans les attaques et de dynamisme global, ce qui rendait le texte incompréhensible du début à la fin ; le jeu délicieux de figuralismes entre musique et texte s'en trouvait fâcheusement amoindri. Seule (Marguerite), avec un Air du Roi de Thulé magnifié par le registre grave exceptionnel de sa voix, a véritablement enchanté le public.

Ainsi, depuis le cent-cinquantenaire de sa naissance Berlioz a trouvé l'orchestre idéal pour interpréter sa musique. Mais aujourd'hui où étaient les chanteurs ?

Crédit photographique : Valey Gergiev © Fred Toulet

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