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A Montréal, le triomphe de sir John Falstaff

Le rire est le propre de l'homme, dit-on, du moins est-il le meilleur remède pour contrer la grisaille et l'ennui. L'Opéra de Montréal a frappé un grand coup en présentant l'ultime opéra de Verdi en cette année du bicentenaire de sa naissance.

Ce Falstaff tourbillonnant de gaité prend corps grâce à qui campe un sir John tonitruant, drôle, excessif en tout embonpoint. Falstaff, c'est surtout la mise en marche d'une pièce de théâtre où tous les personnages impliqués ont une importance capitale pour faire avancer l'action. Le jeu est le maître mot à respecter et le metteur en scène s'appuie sur la dimension shakespearienne – revue et corrigée par le librettiste Boïto – de l'oeuvre. va droit au but, dans un foisonnement comique inscrit à même la partition. On lui doit une direction d'acteurs efficace, où tous les acteurs-chanteurs participent dans la bonne humeur, à cet opéra colossal, pour le plaisir de tous les mélomanes.

Du côté des voix féminines, dans le rôle d'Alice, joue son rôle sans décevoir. Est-il permis de demander un peu plus de volupté et de légèreté ? Son beau soprano pourrait se le permettre.  La Meg de la mezzo-soprano apporte un son cuivré – en réponse à la clarté d'Alice – mais son personnage reste plus convaincant. est splendide en Nannetta, le timbre n'a rien perdu de sa splendeur même si le personnage reste un peu en deçà de l'action. Quant à , elle campe une Mrs. Quickly qui a du caractère, efficace, drôle mais c'est surtout la qualité de son chant qui est à retenir. Son timbre riche de contralto fait des merveilles. Une voix unique, reconnaissable parmi toutes. De plus, elle a le diable au corps et c'est elle qui mène le jeu. Retenons la première rencontre avec Falstaff où elle n'hésite pas un moment à se glisser dans le lit de sir John ! Hilarant !

Le baryton est impressionnant dans le rôle de Ford. Il donne à son personnage un caractère fort, entêté. La scène 1 de l'acte 2 démontre assez bien sa puissance vocale, lorsqu'il croit que sa femme le trompe. Les couleurs de son timbre et sa technique sont irréprochables.

Excellent également le Fenton du ténor . Sa grande musicalité, son aisance sur scène ne pourraient compenser une voix qui se perd quelque peu dans l'immense salle Wilfrid-Pelletier. Tous les autres rôles sont bien tenus : la basse Ernesto Morillo dans Pistola et de Jean-Michel Richer dans Bardolfo. Enfin James McLennan, ténor au timbre clair, complète la distribution.

Mais nous devons la réussite parfaite de cette soirée, à l'omniprésence d' dans le rôle titre. C'est un sir John Falstaff de haute tenue, déluré et risible à la fois, – gras comme un chapon dans le poulailler des commères de Windsor – et qui tente de pénétrer les arcanes de l'univers féminin. Qualité exceptionnelle de la voix, puissante et charisme confondus.

Le chœur de l'Opéra de Montréal, dirigé par , se montre attentif et précis à toutes ses interventions. Maestro fait ressortir la finesse de l'orchestration. Il en assure le rythme, la couleur et souplesse à un en feu. Une production à voir et à revoir.

Crédit photographique : & © Yves Renaud

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