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Fascinante Butterfly au Met

Créée au Met pour l'ouverture de la saison 2006-2007, la mise en scène de Madama Butterfly par continue à faire sensation sur la scène new-yorkaise.

Par son économie gestuelle, par la stylisation extrême de ses mouvements scéniques, littéralement chorégraphiés, elle nous plonge au cœur même d'un drame humain pour une fois débarrassé de tout le kitsch japonais ou de toute la pacotille asiatique qui lui sont généralement associés. Bien au contraire, le recours à tout ce que la culture et l'imagerie japonaises ont de mieux à offrir – la grâce et la puissance des mouvements de danse, le ritualisme distancié de la tradition des marionnettes bunkaru… – ne fait que souligner l'universalité de cette histoire hybride, certes située en Extrême-Orient mais inspirée également d'un roman français et d'une pièce américaine, mise en musique enfin par un compositeur on ne peut plus italien. La sobriété des décors, réduits ici à quelques panneaux coulissants, la somptuosité des éclairages allant du rouge le plus vif à la quasi obscurité, pour ne rien dire de la beauté intrinsèque des riches costumes et de la totalité des images visuelles, contribuent à souligner l'intensité de la passion traversée par Butterfly, victime et produit à la fois d'une civilisation traditionnelle impitoyablement immolée sur l'autel du la modernité qu'incarne le redoutable impérialisme américain. Le DVD mettant en scène la Butterfly de permettra à tous de visionner cette féérique mise en images.

De la version donnée ces jours-ci au Met, on retiendra tout d'abord la formidable Cio-Cio-San de la Chinoise , interprète d'élection pour ce rôle extraordinaire, qui exige de passer par toute la palette des émotions. Dotée d'une voix immense, qui a priori conviendrait davantage à la princesse Turandot qu'à la fragile Butterfly, son art du pianissimo permet tout aussi bien de suggérer les fêlures et les ambiguïtés du personnage. L'ovation debout spontanément offerte à l'interprète au moment de son apparition devant le rideau final en dit long sur le magnétisme opéré sur le public tout au long de la soirée.

À côté d'une telle incarnation, les autres personnages font bien entendu figure de faire-valoir. On retiendra néanmoins le beau Sharpless de , bien chantant et convaincant dans son humanité. Même remarque pour la Suzuki de , très présente scéniquement et tout à fait investie vocalement. Du Gallois , on dira que c'est un Pinkerton sans charme, qui ne contribue pas à rendre sympathique un personnage décidément bien difficile à défendre sur le plan dramatique. On louera enfin sans réserve la superbe phalange du Met, ainsi que la direction ferme et ardente de , chef d'orchestre qui sait mieux que personne mettre en lumière toutes les subtilités d'une partition orchestrale dont on redécouvre à tout moment l'incroyable modernité.

Crédit photographique : © Ken Howard/Metropolitan Opera

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